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Faculté de médecine de Beyrouth jusqu’à l’école primaire des frères de Cadi-Keui et à telle école de la mission laïque, là se montre au grand complet la carie d’échantillons religieuse des populations orientales. C’est d’abord dans les hôpitaux et dispensaires français, puis dans les écoles françaises qu’à la voix des missionnaires français sont tombées les cloisons étanches qui, partout ailleurs, parquent encore les Orientaux des divers cultes en des communautés plus ou moins défiantes les unes des autres. Par une nouveauté de grande conséquence, musulmans et juifs, chrétiens orientaux de tous les rites, sont venus se mêler là, sur les mêmes bancs, pour se soumettre à une même discipline et recevoir un même enseignement.

Si le langage du maître leur convient à tous, c’est qu’il est avant tout, comme toute son attitude, scrupuleusement respectueux de la conscience religieuse de chacun. Le premier enseignement de l’école française est ainsi le respect de chacun pour soi et pour les autres.

C’est le sentiment où M. Taine, dans ses Origines de la France contemporaine, a signalé la condition vitale de nos sociétés modernes, la consigne dont l’application les rend « capables d’un développement indéfini. » — Et le langage du maître convient encore à tous parce que, — l’instruction religieuse mise à part, — il est celui du bon sens universel appliqué à la constatation de faits que tous les yeux peuvent voir, toutes les mains toucher ; un enseignement que tous les esprits, de quelque point de l’horizon religieux qu’ils viennent, peuvent accepter sans défiance , enseignement modeste, certes, et tout tourné vers les applications prochaines, mais qui n’en établit pas moins sur les esprits l’autorité de la science en leur fournissant des vérités toujours susceptibles d’être comprises et vérifiées. Ajoutons que, dans un pays où une oppression immémoriale semblait avoir aboli l’idée même du bien public, l’enseignement français s’est fait honneur de l’éveiller dans les esprits où il pénétrait. Quand je suis arrivé à Beyrouth, en novembre 1891, le choléra venait d’éprouver divers points de la côte, particulièrement Tripoli. La Faculté française de médecine fit un