Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 49.djvu/853

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Des deux côtés, le corps s’effondre,
Plus d’un jeune visage est soudain profané ;
Et cependant peut-on confondre
Les maux du martyr et ceux du damné ?

Peut-on prier pour eux avec les mêmes larmes ?
Peut-on, oubliant leurs desseins,
Dire que les pervers qui meurent sous les armes
Sont les égaux des saints ?

Non, non, dans la bataille un effroyable masque
A beau cacher les traits de ceux que nous aimons
Une vague lueur brille autour de leur casque
Et les distingue des démons.



France, te revoici, naïve, ardente, exacte,
Toujours prompte à remplir le pacte
Que dans les temps anciens tu conclus avec Dieu,
Incrédule, dit-on, mais présent en tout lieu
Où l’âme est en péril et la foi menacée.
Te revoici, fidèle à ta splendeur passée,
A tes morts glorieux, à ton illustre nom,
Empoignant ton cheval aux crins, sautant en selle.
Ou, calme, le front haut, serrant sous ton aisselle
La gueule noire d’un canon.

Te revoici, poussant les fortes lignes bleues
Au combat éternel des bons et des méchants.
Guerrière, dont le cœur pendant de longues lieues
Se berce avec de simples chants.

Te revoici, poudreuse aux carrefours des routes.
Montant au milieu des convois
Vers les grands bastions et les grandes redoutes,
Perdant ta vie à flots, suant à grosses gouttes.
Criant justice encore avec toutes tes voix.