Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 49.djvu/862

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La vague se déploie et, chacun, à son rang,
Nous montons. Ludendorff a dû quitter sa chambre.
Nous montons. L’ennemi par centaines se rend.
Nous semblons des pêcheurs qui pèchent le hareng
Sans arrêt, par gros temps, sous le ciel de novembre.
Nous débordons Vervins, nous rentrons dans Rethel.
Sedan, qui .se souvient de son passé tragique,
Nous accueille en criant : « Vive la République ! »
Le prêtre nous bénit du haut du maitre-autel.
On nous jette des fleurs, on embrasse nos armes.
On rit en même temps que l’on verse des larmes,
Et le soldat boueux, ruisselant, cramoisi.
Retrouvant tout à coup au fond de sa mémoire
Le grand geste oublié de l’antique Victoire,
Brandit dans l’air son casque au bout de son fusil !


IV

ET LE JOUR REPARUT


Ils ont lancé dans les nuages
Trois, quatre appels, d’un cœur tremblant
Puis attendu, dévots et sages,
Ces bons maîtres du faux-semblant !
Mais le ciel bas des jours d’automne
Ne leur montrant qu’un œil atone,
Ils ont hissé le drapeau blanc.

Dernier soupir, aveu suprême
Dans le silence des clairons,
Frissonne au vent, étoffe blême,
Moins blême encore que leurs fronts.
La même averse qui te trempe
Et colle tes plis sur ta hampe
Nous lave des anciens affronts.

Ils sont venus par la grand’route
Arès le coucher du soleil.
La pluie et l’herbe qui s’égoutte