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Tout semble donc converger pour imposer par des moyens de pression pacifique la paix à l’Europe. — Et c’est ce moment que Wall Street et l’Est choisissent pour pousser à la guerre ! — Il y a là, dit la propagande allemande, une véritable trahison des intérêts du pays.

En réalité, entre la note du Président et la note allemande il n’y a pas de liaison. Elle a été rédigée longtemps avant l’envoi des conditions de paix allemandes, mais on l’ignore encore. Et, d’autre part, il est de plus en plus évident qu’il n’espère plus pouvoir imposer pacifiquement la paix, qu’il achemine graduellement les États-Unis à une participation dans la lutte, non, comme on le prétend, pour obéir à Wall Street, mais parce qu’il l’estime inévitable et nécessaire. La presse qui nous est hostile ne peut longtemps nourrir l’équivoque. La rupture des relations diplomatiques, le 3 février 1917, fut pour elle un coup terrible ; la probabilité grandissante de la déclaration de guerre acheva son désarroi. Mais elle se reprend vite. Elle attaque le Président avec la dernière violence. Elle l’accuse d’affoler systématiquement l’opinion publique. Dans les principaux journaux d’énormes annonces qui s’étalent sur toute la page, — et nous savons ce que coûtent aux États-Unis pareilles publications, — supplient le peuple américain de comprendre que la guerre n’est pas le seul moyen d’obtenir la paix.

Il a fallu le coup de tonnerre du message présidentiel du 2 avril pour faire rentrer sous terre les meneurs de ces campagnes. Ils n’osent plus déployer ouvertement une activité qui, à partir de ce moment, devient une trahison. Les La Follette, les Hillquit, Berger, Lee, les socialistes qui ont continué à faire de l’obstruction et à déclarer que la guerre est une guerre de capitalistes, sont désavoués par un grand nombre de leurs partisans mêmes, La conviction grandit que ce n’est pas pour des intérêts particuliers et égoïstes, mais pour l’Amérique et la démocratie que l’on se battra. Rien n’est plus significatif que le revirement qui se produit dans les principales organisations socialistes. Il est d’autant plus remarquable que socialisme et germanisme sont étroitement associés aux États-Unis ; par ses origines, dans son développement, le socialisme américain s’inspire des théories allemandes, et l’influence des idées germaniques y est prépondérante. Cependant, non seulement Samuel Gompers, chef du parti socialiste conservateur, Président