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rapport 90 de la direction de l’Agriculture de l’État de New-York donne une liste de fermes à louer ou à vendre dans ce seul État, qui s’étend sur 189 pages. Les villes instituent des jardins communaux. On s’attaque au problème le plus grave de tous, celui de la main-d’œuvre. Il faut lever « la grande armée de la charrue. » Le ministre de l’Intérieur, Lane, propose d’organiser dans chaque région un « régiment agricole. » Le Sénat vote un crédit de dix millions de dollars pour l’achat d’engrais chimiques. On demande que nulle matière alimentaire ne puisse plus être employée à la fabrication des boissons fermentées. On augmentera les moyens de transports, surtout en allongeant la distance moyenne parcourue par chaque locomotive. On diminuera les envois aux neutres, car on vient de découvrir que par eux on continue à ravitailler l’Allemagne ; rien que pour les céréales les exportations aux neutres avaient passé de 6 millions d’hectolitres en 1911 à 25 millions en 1916. La loi Lever, votée en juin, grâce à l’intervention personnelle du Président, donne à Mr. Hoover pleins pouvoirs. La presse germanophile a beau crier à la dictature, à l’inquisition, à la tyrannie présidentielle, et soulever le Congrès contre toutes les mesures prises, surtout celles qui concernent la prohibition des boissons alcooliques. Elle a beau dire que c’est un régime prussien ou socialiste qu’on tente d’introduire, et que l’on étendra peu à peu à l’acier, au cuivre, au coton, à tout ; si bien que toutes les libertés économiques sont menacées, et qu’il faut à tout prix les défendre. Rien n’y fait ; et peu à peu les mesures les plus radicales sont adoptées.

Je ne connais rien de plus touchant, point de preuve meilleure de la volonté de guerre réelle des États-Unis que leur magnifique acceptation de toutes ces restrictions, et de celles que, librement, ils s’imposent.

Contre cette volonté unanime, les oppositions politiciennes ne peuvent rien. On repousse les tentatives du Congrès de mettre le contrôle des vivres entre les mains d’un triumvirat, et, « après les plus longues et les plus violentes controverses qu’on eût jamais vues dans les Chambres américaines, » la loi sur le contrôle de l’alimentation est votée le 8 août par le Sénat. Mr. Hoover sera seul « directeur » de l’Alimentation, et ses pouvoirs sont ceux d’un dictateur. Cette loi « était la plus révolutionnaire qui eût jamais été proposée à un Congrès