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danger pour la pairie... A l’heure où nous vivons, répandre de tels bruits, c’est proprement seconder l’ennemi, car nous avons aujourd’hui besoin de tout notre courage et de toute notre confiance... (Morgen Post, 11 août.) — A Essen, comme à Cologne et à Dusseldorf et partout, il se trouve des mécontents qui se plaignent de tout, qui ne font ressortir que le côté défavorable et fâcheux des choses, qui ne s’intéressent qu’aux détails, qui ne voient pas l’ensemble, qui méconnaissent la grandeur et la beauté de ce qu’a réalisé le peuple allemand avec son empereur, ses chefs et son armée... Et l’on se dit... Voici que nous venons de subir un nouvel échec, l’ennemi a pénétré dans nos positions, tant et tant de soldats ont été faits prisonniers ; nous avons perdu la partie ! Et ces mêmes gens et d’autres disent : Nous n’avons rien à manger, nous n’avons plus de vêtements ni de chaussures, nous allons mourir de faim et périr misérablement ! Tout homme raisonnable doit s’élever contre de tels propos. (Kœlnische Volkzeitung, 15 août.) — Des bruits circulent. Savez-vous que Hindenburg a été assassiné ? Avez-vous appris que le Kronprinz a été victime d’un attentat ? Une femme dit : Nos soldats sur le front en ont assez. Nous voulons nos maris, nos enfants. Quelqu’un ajoute : Que ceux qui nous gouvernent soient anglais ou français ou allemands, peu importe ! Pourvu que le peuple soit au pouvoir, que nous ayons nos revenus, notre vie paisible ! Nous sommes au cœur de l’été. C’est le moment de l’année où les nerfs sont épuisés et où les suicides sont les plus fréquents. Dans cette période de transition entre l’ancienne et la nouvelle récolte, la nourriture se fait rare dans les grandes villes. Nous ressentons vivement nos pertes en hommes et en argent. Des conseillers inconsidérés ont annoncé, comme pour la guerre sous-marine, un développement rapide, régulier et toujours plus fort de notre offensive à l’Ouest. Au lieu de donner au peuple une conviction fondée sur le raisonnement, on a éveillé en lui une foi aveugle en une marche ininterrompue des événements, alors qu’il faut compter avec des hauts et des bas... (Stuttgarter Neues Tagblatt, 16 août.)


Toutes ces admonestations sont accompagnées d’un rappel des victoires passées et d’un éloge de Hindenburg et Ludendorff : décidément, la confiance du peuple en ses chefs militaires commence à chanceler. Puis ce sont tous les thèmes que la presse ressasse depuis deux ans à chaque nouvelle défaillance de l’opinion ; mais aujourd’hui remontrances et exhortations prennent un accent plus pressant, plus impérieux. Les dirigeants sentent que leurs dupes sont à bout de crédulité et de patience. Ils doivent même inventer de nouveaux arguments, et en trouvent de bien singuliers. Eux qui ne parlaient jamais