Page:Revue des races latines, volume 36, 1863.djvu/564

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Elle a sa Meuse où vont flottant les voiles grises,
Ses jardins tous fleuris sous l’haleine des brises,
Ses palais bien avant dans la terre fondés,
Ses tours, écueils de l’air, où, dans leurs longs voyages,
Se déchirent les plis du manteau des nuages,
Ses églises aux toits brodés.

Reine de nos cités, chaque saison lui donne
Mai ses plus belles fleurs, ses plus beaux fruits l’automne.
L’étranger nous l’envie et voudrait l’emporter.
De toutes ses douleurs notre âme s’y console ;
Et comme au nord fait la boussole,
On y revient toujours quand on l’a pu quitter.

La fauvette, au printemps, y descend plus ravie,
Et l’on y goûte mieux le bonheur et la vie ;
Le nuage en passant s’arrête dans les cieux
Pour la voir plus longtemps sourire sur la terre ;
Et, moins triste, la nuit, dans son nid solitaire,
Le rossignol y chante mieux.

Pas un rayon ne manque à sa riche couronne.
De toutes ses splendeurs la gloire l’environne.
Toujours l’arbre de l’art sur son sol a fleuri.
Elle met des noms d’or sur les tombes muettes
De ses peintres, de ses poètes,
Et coule dans l’airain les hymnes de Grétry.

Puis, pour nous, fourvoyés, dans nos routes banales,
Que de faits éclatants chantent dans ses annales !
Chaque lutte grandit son peuple souverain.
D’un souvenir sacré chaque rue est pavée,
Et partout sur ses vieux murs son histoire est gravée
Par le glaive, son vieux burin.

Ô Liége ! tu couvas cet aigle aux grandes ailes
Qui tournait tour à tour ses ardentes prunelles
Du monde des Gaulois au monde des Germains,
Ce géant immortel qu’on nomme Charlemagne,
L’empereur qui tint l’Allemagne,
L’Allemagne et la France à la fois dans ses mains ;