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ÉDUCATION DE PAULINE DE GRIGNAN.

étant survenus coup sur coup. Aussi plaisantait-elle le bon président Moulceau, qui venait d’obtenir le même avancement et qui n’en paraissait pas enchanté : « Vous êtes vraiment bien délicat et bien précieux, de vous trouver atteint d’une petite attaque de décrépitude, parce que vous êtes grand-père et que madame votre fille a pris la liberté de vous en faire une autre : voilà un grand malheur ! Et à qui vous en plaignez-vous, Monsieur ? à qui pensez-vous parler ? et que feriez-vous donc, si vous en aviez une qui eût pris l’habit à la Visitation d’Aix à seize ans ? Vraiment, vous feriez une belle vie : et moi, je soutiens cet affront comme si ce n’était rien. » (6 janvier 1687.)

Cette jeune visitandine d’Aix était Marie-Blanche, première fille de Mme de Grignan, aimable et douce enfant, à qui il fallut trouver une vocation religieuse pour qu’elle laissât la place libre à son frère, héritier du nom. C’était l’usage alors, et il s’en manqua de peu que la même vocation n’échût à Pauline, sœur du petit marquis. Elle en fut quitte pour des séjours plus ou moins prolongés au couvent d’Aubenas, que Mme de Sévigné préférait à la Visitation d’Aix : « car, écrit-elle, nos sœurs d’Aix ne rendent pas aisément ».

En 1679, Pauline était dans sa sixième année. C’est déjà l’âge où on devient petite personne ; le caractère se dessine, les traits de la physionomie aussi, qui sont l’expression et le reflet du caractère. C’est une nouvelle individualité dans la famille et avec laquelle il faut compter, ce n’est plus une poupée parlante. Le moment de transition entre poupée et petit personnage a quelque chose de charmant : c’est une éclosion. Mme de Grignan, quoique tout absorbée par son fils et par son rôle de quasi-reine de Provence, paraît avoir senti ce charme, et sa mère l’y encourage fort : « Mais