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tirer des conséquences par voie déductive (physique, théorie mécanique de la chaleur, magnétisme, etc.).

Période de vérification. On contrôle l’hypothèse en cherchant à réaliser les conséquences qu’on en tire. À mesure que l’expérience en confirme la vérité, elle acquiert un degré de plus en plus marqué d’évidence, et la foi en son exactitude croît de plus en plus (mécanique céleste, acoustique, optique mathématique, etc.).

Période de consécration. La confiance est désormais inébranlable ; on a une telle foi dans l’infaillibilité des principes et des méthodes que l’on ne prend plus la peine d’en vérifier les conséquences (mécanique, géométrie, algèbre, arithmétique). Quand la science en est arrivée à ce point, des penseurs s’imaginent qu’ils tirent certaines vérités de leur cerveau, et que l’expérience leur est inutile. Quelques-uns même essayent alors de construire le monde réel par la seule force de leur intelligence.

On voit comment s’explique l’apodicticité des théorèmes mathématiques. Les sciences mathématiques, en effet, n’ont ce caractère que grâce à la confiance que nous inspirent leurs principes et leurs méthodes, confiance justifiée d’ailleurs par de longs et éclatants succès. On a commencé par remarquer que la somme des trois angles d’un triangle était plus ou moins définie, car l’on ne peut y agrandir un angle sans en diminuer par contre un autre. On a aussi remarqué, comme nous l’avons tous fait dans notre enfance, que le rayon se portait six fois sur la circonférence. Ces faits traduits en lois, on a, pour expliquer ces lois fondées sur une observation constante, émis certaines hypothèses : ce sont les axiomes et les postulats. On a ramené les dimensions de l’espace à trois. On a considéré l’espace en lui-même comme homogène, c’est-à-dire comme composé de parties de même nature. On a supposé un espace homogène à deux dimensions, le plan ; puis un espace homogène à une dimension, la droite. On a formulé les propriétés générales de la droite, du plan et de l’espace, puis on a défini les lignes, les surfaces et les solides, et les combinaisons diverses que l’on peut obtenir au moyen de lignes et de surfaces. Enfin, on a appliqué à ces notions les procédés logiques qui nous permettent de tirer une nouvelle idée de la comparaison de deux propositions. On a donc commencé par déduire, au moyen du raisonnement, la démonstration des faits déjà observés ; puis on a tiré des conséquences non encore observées, mais en les vérifiant au moyen d’une construction soignée, et faisant la figure aussi exacte que possible, on a vu qu’elles étaient justes. Peu à peu, nous avons acquis une confiance de plus en plus grande dans les principes et