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encore, ceux qui constituent le rythme incessant des fonctions fondamentales de la vie (mouvement du cœur, des organes respiratoires, etc.). Bien que, à l’état normal, l’action de tous ces mécanismes ne parvienne pas à la conscience, il est difficile, il est impossible d’admettre qu’ils ne jouent pas un rôle capital dans le sentiment général que nous avons de notre existence, sentiment très vague, qui cependant sert de base à tous les autres et qui ne devient inconscient que par l’habitude. « Non seulement les mouvements au sens ordinaire du mot, mais les mouvements des artères et des viscères sont représentés dans le cerveau. » Ainsi s’exprime l’un des physiologistes qui a le plus profondément étudié le sujet qui nous occupe[1]. Mais il est inutile d’insister sur un point où nous ne pourrions faire que des hypothèses plausibles. D’ailleurs, dans ces réflexes qui ne sont que la matière de la conscience, comment faire au juste la part de ce qui est dû à l’élément moteur ? Nous ferons seulement remarquer qu’ici, au début de notre recherche, — dans le réflexe, — tandis que l’excitation initiale est souvent mal connue, difficile à localiser, la période de la réaction est le moment le mieux connu, le plus frappant, le plus important. Les mouvements tiennent donc le premier rôle.

Notons, en passant, que c’est ici qu’on peut voir clairement pourquoi l’étude des mouvements a été si légèrement traitée par l’ancienne psychologie et pourquoi elle a été reprise dans ces derniers temps. Les psychologues intérieurs, expliquant tout par « l’âme », avaient pour principe de ne pas s’occuper des conditions organiques et de n’étudier que des états de conscience tout formés et par conséquent très complexes. L’école adverse, au contraire, cherchant un fil conducteur dans la connaissance du système nerveux, apprend de la physiologie que le réflexe est le type unique qui se retrouve au fond des actions nerveuses les plus compliquées et les explique. C’est, en effet, une opinion universellement admise aujourd’hui que l’activité cérébrale, si élevée qu’elle soit, ne diffère pas quant à ses éléments constitutifs du simple réflexe spinal. Huxley, Maudsley et d’autres contemporains ne voient même dans l’état de conscience qu’un simple accompagnement, analogue à l’ombre qui suit le corps. Quoi qu’on puisse penser de cette dernière assertion, l’acte réflexe reste toujours le fait simple qui sert à expliquer les faits complexes ; et si tout état psychologique doit être rattaché à une action nerveuse, si toute action nerveuse se réduit à des réflexes, si tout réflexe

  1. Hughlings Jackson, Clinical and physiological Researches on the nervous System. IOn the localization of movements in the Brain, p. 18.