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analyses. — benno erdmann. Philosophie in Deutschland.

Mars et Jupiter aucun corps céleste ne doit se rencontrer, alors que, dès le mois de janvier de la même année, Piazzi avait signalé entre eux l’existence de la première des petites planètes.

Les contradictions de ce genre n’avaient pas tardé à se multiplier entre les prétendues révélations de la raison métaphysique et les découvertes incontestées de la méthode scientifique. Mais elles n’avaient pu secouer le sommeil dogmatique des dialecticiens de l’absolu : la spéculation et la science physique avaient fini par devenir absolument étrangères l’une à l’autre.

Les disciples de Hegel n’étaient pas également demeurés indifférents aux recherches de la critique historique, aux résultats de l’exégèse religieuse. L’apologie du dogme chrétien, qui semblait le couronnement de la philosophie religieuse de Hegel, avait déjà provoqué d’ailleurs les résistances de la libre réflexion. En 1831, Feuerbach, dans son livre sur la mort et l’immortalité, s’était fait l’interprète de ces protestations. Mais la Vie de Jésus de Strauss (1835) vint porter le coup décisif au rationalisme mystique de Hegel. La vérité, la nécessité historique de la révélation et du dogme chrétien, qui semblait le dernier mot et la suprême confirmation de la dialectique hégélienne, succombaient misérablement devant la sèche discussion des textes, devant les prosaïques exigences de la critique historique. L’école de Tubingue, qui se forma bientôt sous la direction de Baur, poursuivit intrépidement l’œuvre commencée par Strauss. Le livre de Feuerbach (1841), l’Essence du christianisme, acheva la défaite de la théologie hégélienne et commença la dispersion de l’école, qui ne se maintenait plus qu’à grand’peine, après s’être divisée en trois groupes, la gauche, la droite et le centre.


Alors commence une période d’anarchie métaphysique, que remplissent des tentatives diverses, mais également impuissantes, pour faire cesser entre la science et la spéculation l’antagonisme qui s’est manifesté d’une manière si inattendue aux yeux des moins clairvoyants.

L’école des philosophes positifs, dont le nom est surtout une protestation contre la philosophie de la religion de Hegel, entreprend de fonder un théisme indépendant de la théologie chrétienne et en même temps respectueux de la personnalité divine, de la liberté humaine et de l’immortalité. Chr. H. Weisse, et à côté de lui Fichte le jeune, Ulrici, Carrière, etc., sont les principaux représentants de cette tendance à mettre les dogmes religieux du spiritualisme à l’abri des atteintes de l’exégèse religieuse et de la critique scientifique.

Le même besoin de faire cesser le désaccord de la vérité historique et de la vérité philosophique s’accuse dans l’opposition que Trendelenburg et son école dirigent contre la philosophie de l’histoire de Hegel. L’exemple et le succès de Trendelenburg tournent vers les études historiques les esprits, qui voient plus clairement les vices de la philosophie présente que les moyens de les corriger.