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L’étude impartiale des systèmes, en éclairant l’esprit sur les causes multiples de leurs fortunes diverses, ne contribue pas médiocrement à le défendre contre les illusions du dogmatisme métaphysique, et achève de le rendre incrédule aux promesses trop faciles de l’idéalisme hégélien. Telle est l’influence bienfaisante qu’exercèrent l’admirable Histoire de la philosophie grecque de Zeller, les savantes recherches de Schwegler, de Waitz et surtout de Bonitz sur le même sujet, les beaux travaux de Ritter, de J.-E. Erdmann, de Prantl, de Kuno Fischer et de bien d’autres.

En même temps, l’école de Herbart et celle de Schopenhauer voyaient se ranger sous leur bannière les esprits que l’insuccès de l’hégélianisme n’avait pu détacher de la métaphysique, mais qui n’avaient pas pris leur parti du divorce de la science et de la spéculation.

C’est surtout par la vive et originale impulsion qu’elle communique aux recherches psychologiques, et par les progrès que leur doit l’étude, alors si populaire, de la pédagogie, qu’Herbart réussit à conquérir et à garder longtemps la faveur publique, et à compter parmi ses disciples des hommes comme Bonitz, Waitz et Steinthal, Drobisch, Hartenstein et Zimmermann ! Mais la métaphysique proprement dite de Herbart est à peu près complètement étrangère à cette fortune de l’école.

L’attention qu’excite l’apparition en 1844 de la seconde édition du grand ouvrage de Schopenhauer Le monde comme volonté et représentation, ne suffit pas à contrebalancer l’intérêt qui s’attachait aux travaux des disciples de Herbart. Malgré les satisfactions qu’elle donne ou qu’elle promet à l’esprit scientifique du siècle et que Zœllner paraît bien avoir quelque peu exagérées, la philosophie de Schopenhauer est moins faite encore que celle de Herbart pour amener la réconciliation de la science et des philosophes.

Il était réservé à Lotze et à Fechner de tenter le premier pas décisif dans cette voie.

Tous deux avaient débuté par l’étude des sciences et s’y étaient fait un nom de bonne heure. Les travaux de physiologie médicale de Lotze, les essais de physique mathématique de Fechner permettent de mesurer à quel point les deux auteurs avaient été touchés par le génie scientifique du siècle. Par ses savants articles du Dictionnaire médical de Wagner et par ses études de pathologie, Lotze contribua plus que tout autre à faire triompher dans l’étude de la vie la cause du mécanisme, et porta le coup définitif au principe vital. En même temps, dans sa Psychologie médicale, il ouvrait la voie aux théories empiriques sur l’espace que soutenait la psychologie physiologique. Les recherches de Fechner sur l’électricité, sur la psychophysique, sur les théories darwiniennes n’assurent pas à ce savant un rang moins honorable parmi les promoteurs ou les interprètes de la science contemporaine. Les deux auteurs se rapprochent encore par leur éducation métaphysique. Fechner, qui, dans les premières satires qu’il dirigea contre la médecine de son temps, se montre sévère jusqu’à l’excès contre la phi-