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ANALYSES ET COMPTES-RENDUS



Terenzio Mamiani. — La religione dell’avvenire (Milano Trêves, 1880).

« Il n’y a guère eu d’époque plus irréligieuse que la nôtre, et cependant on en trouverait difficilement une autre que les questions religieuses aient agitée plus profondément… Le problème religieux s’impose aujourd’hui à tous les penseurs, et l’on s’explique à merveille le zèle avec lequel on s’évertue de tous côtés à produire une religion qui, s’harmonisant avec l’esprit moderne et les fins de notre civilisation, soit à la hauteur de sa mission naturelle, c’est-à-dire capable de faire l’éducation idéale du peuple[1]. » Cette déclaration, tirée de la préface de M. de Hartmann, pourrait servir d’épigraphe au livre que M. le comte Mamiani vient de publier, en réponse à l’opuscule allemand dont il n’a pas craint d’emprunter exactement le titre, pour bien montrer qu’il compte reprendre à nouveau la question déjà traitée par son prédécesseur. Mais, si l’objet est le même, l’esprit des deux ouvrages n’en diffère pas moins absolument. M. de Hartmann est un de ces métaphysiciens, issus de Kant, dont le subjectivisme prend parfois l’allure du positivisme, surtout dans l’étude des questions sociales. La nécessité de la religion est pour lui un fait, qu’il ne cherche point à expliquer par des raisons transcendantes, et dont la portée ne lui semble pas dépasser le domaine de la psychologie humaine. Une expérience toute récente lui a rendu ce fait plus présent encore ; car il a pu constater, d’une part « la puissance avec laquelle se redresse de nos jours l’Eglise catholique, qui se montre encore capable de fanatiser les masses », d’une autre « la brutalité sans voiles, affichée par la démocratie sociale dans l’allégresse cosmopolite qui saluait les horreurs de la Commune parisienne[2] ». La religion lui parait donc « indispensable comme ressort éducatif principal pour développer dans le peuple le sens de l’idéal ». Ajoutez à cela la conviction que « le christianisme a fait son temps », que « l’édifice religieux, troué et rongé en tous sens par l’esprit critique de notre époque, ne saurait plus être conservé », ni sous la forme strictement traditionnelle (et par là même incompa-

  1. E. de Hartmann, La religion de l’avenir, p. 7 et 9.
  2. Id., ibid., p. 8.