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BÉNARD.la mimique dans le système des beaux-arts

son dénouement. De tous ces éléments réunis elle pourra faire un spectacle animé, vivant, propre à satisfaire les regards et à intéresser l’esprit de celui qui le contemple. Peut-être lui sera-t-il donné ainsi de rivaliser avec les autres arts et de les égaler comme c’est son ambition.

II

La mimique ainsi comprise, quel champ lui est-il donné de parcourir ? Quelle est, autrement dit, l’étendue de son domaine ? quels sont ses espèces et les arts qui lui appartiennent, qui relèvent de sa juridiction ? ceux à qui elle prête un utile et nécessaire secours ? C’est un point qu’il nous suffira encore d’indiquer pour le sujet que nous avons entrepris spécialement de traiter.

1o La mimique, sous sa forme la plus simple, peut se borner à la représentation, par un seul individu, d’une scène individuelle ou d’un caractère empruntés à la vie humaine dont elle mettra sous nos yeux le côté original, capable de nous intéresser au point de vue du beau, du terrible, du tragique et du pathétique, du comique et du grotesque et du ridicule. Elle doit le faire en observant les lois qui lui sont communes avec tout art et celles qui lui sont propres, qui résultent de son mode particulier d’imitation ou de représentation. Ce sera la mimique proprement dite, et son premier degré, la pantomime.

2o Mais le champ de la mimique peut s’étendre bien au delà de ces limites. Outre ce qu’il lui est donné d’exprimer dans la personne d’un individu avec ce seul moyen, le corps humain, ses formes, ses mouvements et ses gestes, elle peut, comme la statuaire, comme la peinture et même comme la poésie dramatique dont elle est dans l’action théâtrale l’auxiliaire indispensable pour la représentation ou l’exécution de ses œuvres, faire agir sous nos yeux, elle aussi, plusieurs personnages, former des groupes, arranger des scènes, représenter une action complète dans sa complexité et son entier développement avec tous les éléments qui la composent. C’est alors un drame muet qui se joue sous nos yeux. Il peut y avoir monologue, dialogue, succession de scènes variées et combinées. L’action y est représentée dans tous ses moments et ses détails, ses phases et ses péripéties, son nœud, sa catastrophe et son dénouement final.

La mimique peut, comme la poésie, avoir ici ses genres ou ses espèces, être tour à tour lyrique, tragique, comique, mêler tous ces genres. À ce degré elle peut rivaliser avec l’art dramatique comme avec l’art oratoire, ainsi que son histoire en fournit des exemples.