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probité. On sent qu’il a pris goût à ces exercices de gymnastique intellectuelle, et qu’il n’est pas fâché de montrer qu’il y excelle.

Pourquoi tous les animaux ne sont-ils pas dociles ? Pourquoi n’y en a-t-il qu’un petit nombre qui apprennent à parler ? Tout en remarquant que leur aptitude à apprendre n’est pas sans quelque ressemblance avec la capacité de l’homme, il répond ingénieusement qu’il faut, pour que l’animal sache parler ou chanter à l’imitation de l’homme, qu’il ait reçu de la nature les organes propres à la formation des sons. C’est reconnaître une vérité qui, méconnue, a donné lieu à tant d’erreurs, à savoir qu’il n’y a point de fonction sans organe. Faculté ou fonction, c’est pour lui même chose. Les fonctions diffèrent dans la série ; ce sont les degrés qui marquent les différences. C’est ainsi que, pour le jugement, il admet une faculté qui manque aux bêtes. Mais il reconnaît le pouvoir de l’habitude ou de la répétition des actes réguliers, périodiques.

Voici un raisonnement par analogie qui est original et fin. Ne voit-on pas les gens qui ne font que deux repas par jour, n’avoir faim qu’aux heures de ces repas, tandis que l’appétit s’éveille aussi aux heures du déjeuner et du goûter, si l’on a pris l’habitude de ces deux repas accessoires ? La cause en est que le suc mélancolique monte à l’orifice du ventricule, aux heures dites. Changeons les termes avec la théorie, et nous dirons que la secrétion du suc gastrique répond aux heures de la réfection. De même, conclut l’ingénieux logicien, à force de pénétrer dans la cervelle des perroquets et des merles, les sons de la voix humaine mettent en mouvement les organes vocaux qui étaient auparavant au repos. De même encore, les singes et les chiens, voyant les mouvements de l’homme, finissent par mouvoir leurs membres d’après le modèle qu’ils ont sous les yeux, le fouet et la gourmandise aidant.

L’analyse qui suit, sur les effets de l’air transmettant au cerveau les sons à reproduire par la voix, prouve l’intention certaine de ramener la science des fonctions, la physiologie, à la physique et à la mécanique. S’il vivait de nos jours, la biologie ne serait pour lui que la physique animale, végétale, ou la statique, que Hales et ses interprètes, Sauvages et Buffon, ont failli confondre avec la dynamique. Ce qui étonne et surprend même, c’est qu’avec des tendances aussi manifestes au concret, il n’ait pas invoqué des expériences, au lieu de recourir à des comparaisons purement physiques et mécaniques, telles que la figure des cercles concentriques, formés par la pierre lancée dans l’eau, ou l’empreinte du sceau dans la cire. Les animistes stahliens, qui ont abusé de ces comparaisons méca-