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propre propre excessifs, d’une impressionnabilité maladive. Si les femmes hystériques, comme les épileptiques, ont un penchant à s’associer dans les asiles, car elles sont très imitatrices, leur mode d’association consiste, de même, à se quereller continuellement.

Or, c’est un des mérites du livre si substantiel, si instructif, malgré tout, que nous étudions, d’avoir montré supérieurement que l’hystérie, comme l’épilepsie, est un excellent bouillon de culture pour le microbe du délit. Mais la preuve que ce microbe et ce bouillon font deux, qu’ils peuvent exister et se développer fort bien l’un sans l’autre, c’est le phénomène si fréquent des hystériques saintes, vertueuses, extatiques, tout adonnées aux bonnes œuvres un peu bruyantes peut-être, mais salutaires en somme. Lombroso reconnaît que ces femmes-là, mauvaises maîtresses de maison au surplus et négligeant leur intérieur, sont une providence dans les malheurs publics, pendant une épidémie ou une insurrection. Elles se jettent dans un fleuve pour sauver un enfant, elles bravent les balles sur une barricade ou un champ de bataille pour porter secours aux blessés. « Vertueuses par maladie », dit M. Legrand du Saulle ; « altruisme anormal », dit notre auteur. C’est possible, mais voilà des anomalies et des maladies que nos médecins devraient bien propager. Puissions-nous avoir aussi un certain nombre d’épileptiques écrivains ou artistes de génie !

VII. — Arrêtons-nous au délinquant d’occasion, qui clôt la série. Le délinquant par nature, et aussi bien le délinquant d’habitude, diffère du délinquant d’occasion par un caractère que Ferri a nettement marqué : le premier est poussé au crime par une force intérieure, acquise ou innée, d’où lui vient l’étrange plaisir qu’il goûte à mal faire ; tandis que le dernier, quand une force extérieure l’y pousse, n’est pas retenu dans l’honnêteté par une répugnance suffisante. Mais, le malheur est que l’occasion est toujours le point de départ d’une habitude, et le défaut de répugnance conduit, par la répétition des mêmes actes, à y trouver une jouissance de plus en plus vive. Je ne ferai donc pas difficulté de concéder à Lombroso, comme à Garofalo, que la distinction établie entre ces deux catégories de malfaiteurs est plus superficielle que profonde. L’occasion ne fait pas le larron, disent-ils avec raison, elle le révèle. L’occasion n’agit que par sa rencontre avec une condition interne du sujet, condition produite soit par l’hérédité, soit par l’éducation, soit plutôt par une combinaison des deux, mais, en tout cas, par une action directe ou indirecte du milieu social où les ancêtres de l’individu ont été baignés toute leur vie comme lui-même. C’est donc à tort que les anthropologistes s’efforcent de réduire le plus possible la part des