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KORSAKOFF.des maladies de la mémoire

donc que le plus probable, c’est que la fixation des impressions se fait dans les cellules nerveuses et dans les tubes nerveux du système d’association.

Bien des faits nous font supposer que plus il y a de groupes associés pour former une impression, plus les traces en seront résistantes. C’est ce qui explique ce que dit M. Richet que la trace de l’impression est d’autant plus profonde que la réaction psychique qu’elle produit est puissante. C’est la raison aussi pour laquelle, si nous voulons nous souvenir de quelque chose, nous tâchons de rétablir la relation de ce souvenir à toute une suite d’autres impressions. Par conséquent, les traces les plus résistantes doivent être celles qui embrassent le plus grand nombre de groupes de cellules associées.

Quoi qu’il en soit, quelque profondes que soient les traces des impressions passées, restant à l’état latent, elles seraient nulles pour la vie psychique, si nous ne possédions la faculté d’évocation (de reproduction). Grâce à cette faculté, les traces latentes sont rappelées à l’activité et influent sur le cours des procès psychiques. Cette propriété est la mémoire d’évocation (Richet). Grâce à cette faculté les traces des impressions passées sont ravivées et deviennent conscientes. La mémoire dépend donc de la reproduction des traces des impressions antérieures, reproduction qui doit être assez vive pour être consciente.

Est-ce que cela veut dire que la reproduction des traces est toujours consciente ? M. Richet pense que non, que l’on doit admettre une reproduction des traces inconscientes. Il y a une masse de faits qui nous indiquent que nos actions, la direction de notre attention, etc., se trouvent sous l’influence d’impressions antérieures, inconscientes pour nous ; on ne peut l’expliquer qu’en reconnaissant que ces traces sont reproduites, mais si faiblement qu’elles n’arrivent pas à l’état conscient. En effet, pour qu’un procès psychique devienne conscient, il doit posséder un certain degré d’intensité et de durée. S’il ne les a pas, il ne sera pas conscient. Il s’ensuit que toutes les reproductions d’impressions qui n’atteignent pas ce degré d’intensité et de durée restent inconscients ; mais cela ne les empêche pas d’influer sur le cours du raisonnement, sur l’humeur : la mémoire de ces productions inconscientes peut avoir des effets importants et nous en avons vu une confirmation dans les cas que nous avons exposés.

Il s’agit de savoir maintenant de quoi dépend la reproduction des traces fixées ; quel est le mécanisme qui pourrait le faire ? Les observations constatent que cela se produit passivement : 1o lorsque l’im-