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Bien que les chiffres obtenus par divers auteurs soient assez rapprochés, plusieurs d’entre eux cependant diffèrent sensiblement. Il en est ainsi, par exemple, pour le temps de la réaction contre le son (Wittich, Donders, Wundt, Exner, Auerbach et autres).

Je crois que, dans les recherches de ce genre où il s’agit de millièmes de seconde, l’appréciation dépend beaucoup, non seulement de la méthode, de la précision des expériences, de la variété individuelle des sujets en observation, mais aussi des particularités inhérentes à l’observation elle-même. C’est pourquoi il me semble que, dans les études de la mensuration du temps des processus psychiques chez les aliénés, il faut faire parallèlement les mêmes mensurations sur des personnes saines.

Dans ce but, j’ai entrepris une série d’expériences sur des personnes bien portantes en conservant autant que possible l’identité des conditions d’expériences. De cette façon je me suis mise dans la possibilité de comparer les chiffres, tous obtenus par moi-même, soit sur des personnes saines, soit sur des malades.

Quant à la méthode d’observation que j’ai suivie, elle est presque la même que celle de M. Tchige. Comme lui, je me suis servie aussi du chronoscope de Hipp que M. le professeur Bechtéref a mis aimablement à ma disposition.

Pour sujets de mes expériences, j’avais les pensionnaires de l’asile des aliénés de Kazan, grâce à l’obligeance du directeur de l’asile, M. Ragosine. J’ai particulièrement expérimenté sur des malades atteints de paralysie générale et j’eus la chance de pouvoir réunir une série de malades aux différentes périodes de la maladie.

Pour mener à bonne fin mes recherches, il était indispensable de bien étudier et déterminer l’état actuel de mes malades. C’est à quoi je m’appliquai.

Ceux que j’avais choisis peuvent être classés de la manière suivante : 3 cas de démence paralytique primitive, sans délire, mais avec troubles prononcés de motilité ; un cas de rémission après agitation maniacale intense ; un cas de paralysie générale au début, période d’excitation, et enfin un cas que j’ai pu observer dans deux phases différentes : d’abord à l’état de rémission et ensuite à l’état d’agitation maniaque. J’eus ainsi des observations faites sur le même sujet malade à deux périodes différentes de la maladie.

Je fis en outre des expériences sur un malade dont le diagnostic n’a pas encore été posé définitivement[1]. Il se trouvait à l’état de

  1. Les symptômes d’après lesquels il avait été admis à l’asile sont les suivants : affaiblissement de l’intelligence, légèreté avec laquelle il acceptait sa situation actuelle et l’avenir, grosses fautes d’orthographe (le malade est médecin vėtėri-