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GUARDIA.philosophes espagnols

tion du fœtus et aux mouvements inconscients ; ou bien il faut admettre que des intelligences spéciales dirigent les diverses fonctions. Ici on pourrait voir la première conception des archées topiques ou secondaires ; quelque chose d’analogue au polyzoïsme, à la vie multiple ; par conséquent la variété dans l’unité ; car il veut l’unité, tout en admettant la pluralité. Cette explication moderne de l’ancienne physique serait très compatible avec les doctrines de l’évolution et du transformisme. Dans tous les cas, la cause universelle embrasse tous les êtres vivants, plantes, bêtes et hommes ; et la génération n’est qu’un cas de la nutrition, propriété fondamentale.

On remarquera qu’il conclut de l’anatomie à la physiologie, par la comparaison des appareils d’organes. Tous les nerfs de mouvement sont d’origine cérébrale, et le cerveau est le centre moteur, principium illud motus, cerebrum appellatum. Les sens externes qui aboutissent au centre cérébral sont des expansions du système nerveux, qui transmettent les images au centre des sensations, de manière à provoquer les mouvements utiles à l’animal, comme le fer est attiré par l’aimant, principio motus affecto, ut ferrum inducta in se qualitate motrice a magnete duci in magnetem compellitur. La forme si heureuse de cette comparaison, tant de fois répétée, accuse nettement l’intention de réduire la science des fonctions de la vie à une sorte de physique animale, et de proclamer la souveraineté de la loi naturelle.

Une autre objection se tire des effets différents de la cause unique et la même pour tous les animaux. Si cette cause universelle qui règle les mouvements des animaux est partout présente et active, elle devrait imprimer les mêmes mouvements, ou du moins des mouvements semblables à tous les animaux sans exception. À cette objection spécieuse l’auteur répond que, de même que la cause universelle qui préside aux esprits générateurs ne donne pas une forme unique à tous les animaux et à toutes les plantes ; de même aussi, selon les formes de l’animal, les mouvements qui lui conviennent lui sont appris par cette cause extérieure, non sans l’intervention des images objectives, ac prout sua forma substantiali expedit, sic alii ac alii motus ab illa causa extrinseca docentur, objectorum speciebus non parum conducentibus. Ainsi s’explique la docilité des perroquets, des merles, des chiens et autres animaux savants. Les mouvements en général, les gestes, les cris, les manifestations extérieures, en un mot, qui semblent traduire ce qu’ils ne sentent point, tout cela n’a d’autre raison d’être que l’utilité. L’auteur entend par là l’instinct de la conservation, qui pousse les bêtes à faire inconsciemment ce qu’elles font, intelligentia quæ cogit bruta ea facere, quæ non intel-