Page:Ribié - Geneviève de Brabant, 1804.djvu/20

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ils s’éloignent. Sifroi paraît seul, il est accablé de fatigue ; il aperçoit la fontaine, il veut appaiser la soif qui le tourmente, il prend de l’eau dans ses mains, et boit. Il se repose sur le banc de gazon.}}

Sifroi.

Hélas ! il n’est plus de plaisir, plus de repos, plus de bonheur sur la terre pour l’infortuné Sifroi, l’ombre de ma malheureuse épouse, me poursuit partout. Et je ne puis faire un pas, sans l’appercevoir à mes tristes côtés. Non, elle n’étoit point criminelle ; la vengeance céleste qui tombe sur ma tête coupable, atteste mon crime, et son innocence ! ah la vie m’est insupportable. Je me vois plongé dans un abîme de remords, je veux me distraire, mais en vain ; Semblable à un cerf que le chasseur a blessé, il court au travers des vastes forêts pour soulager sa douleur ; mais la flèche qui l’a percé le suit partout. Il porte avec lui le trait meurtrier… Ah ! j’erre en vain pour m’oublier moi-même, et rien n’adoucit la plaie de mon cœur. Mort affreuse ! mort cruelle ! toi qui vient par mes ordres, de frapper la vertu… la beauté, porte des coups plus sûrs, plus mérités, punis le crime, accable un féroce époux, assassin de la nature dans son plus bel ouvrage.

(Il tire de dessus son cœur, le portrait de Geneviève, verse des larmes, et l’embrasse mille fois.)

Image chérie, reste précieux, adorable copie, que n’as-tu le pouvoir d’accabler le bourreau de ton vertueux original. Hélas ! le sommeil semble vouloir s’emparer de mes sens ; ah ! puissai-je y trouver le repos. Divin Morphée, repends tes doux charmes sur mes paupières appesanties ; fais passer une vapeur divine dans ce corps fatigué, et qu’un doux songe repousse ces images funèbres qui me tourmentent. Dieu puissant ! rends pour un moment au malheureux Sifroi ces tableaux vivants de félicité passée ; tu ne perdras rien à ta vengeance, si tu me présentes l’idée du bonheur dans un court repos : le désespoir, les remords et la douleur m’attendent au réveil. (Il s’endort.)

SCÈNE VII.

{{didascalie|Morphée descend sur un nuage ; il appelle l’amour et l’hymen ; ils accourent accompagnés par les plaisirs. Morphée jette une guirlande de pavots sur Sifroi. Le théâtre se couvre d’une vapeur ; les amours et les plaisirs forment plusieurs grouppes amour de Sifroi, qui parait fort agité par un songe. L’amour et l’hymen croisent les flambeaux. Les nuages s’ouvrent, et laissent appercevoir Geneviève dans une grotte, qui soutient son enfant sous le ventre la biche, qui lui