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une émanation de Dieu devenue grossière et imparfaite. Chez les chrétiens, la séparation des créatures intelligentes et de Dieu fut un résultat de la volonté des premières. Pour les Alexandrins, un Dieu, unité mobile, engendra l’intelligence, engendrant l’âme, qui tombe par la projection de sa propre puissance sous la domination des lois de l’espace, du temps et du mouvement et engendre la matière, l’unité de ses dernières émanations. Le monde céleste est parfait ; le monde sublunaire, imparfait ; le monde sensible, représentation du monde intelligible et supérieur, dans la matière qui est sa dégénération. Le mal y conspire en faveur du bien ; étant l’aiguillon de l’âme, il n’est que la négation du bien, comme la matière celle de l’être. L’École d’Alexandrie résout la conception générale de l’univers dans un élément unique. Mais en ce moment apparaissent les inspirés de Dieu, Apollonius de Tyane, etc. D’après Valentin, Dieu est inaccessible ; le fils seul connut le père ; il est l’Eon Kristos ; il ressemble au Nous de Basilide, au Proto-Anthropos des Ophites, au Christ des Docètes, qui passe sur la terre comme une pure apparence. La gnose est surtout du mysticisme et du surnaturalisme judaïque, chaldéen s’inspirant du dualisme perse, de la philosophie platonicienne ; elle produisit les hérésies chrétiennes. Simon le magicien entraine avec lui Ennoia, chair méprisable qui fut Hélène, Astarté, Dalila, Christ-femelle enfermant la pensée et sauvant l’humanité par l’abjection (théorie mazdéiste). Cérinthe, l’ennemi de l’évangéliste Jean, prétend que Dieu s’est subordonné des génies ; seul, le Fils de Dieu eut l’esprit prophétique ; avant d’être Christos, il était un simple mortel ; l’homme-Jésus seul souffrit la passion et la mort ; l’Esprit divin restait impassible. Pour Saturnin, le créateur de la terre est un des anges maudits ; il est forcé de créer l’homme et l’image du verbe ; comme ils ne réussissent pas, le Verbe envoie à l’homme un rayon de vie céleste. La chair n’eut donc que des idées perverses. Il faut jeûner, rejeter la viande et la femme. Le Christ est venu pour détruire l’œuvre du démon Jéhovah. Bardesane voit un Dieu vivant, au sein de la lumière ; en face la matière mère et demeure de Satan. Dieu s’est manifesté en Eons et en Zizygies. It s’est créé une compagne. Son fils Christos a épousé Pneuma, création de Dieu. Du haut des planètes, une Heptas règle l’univers. La destinée de l’homme dépend de sa volonté. Chaque constellation est présidée par un génie, dix par un décan. L’homme ayant violé la loi divine, son corps matériel fut soumis à Satan et aux influences sidérales. Le Christos rédempteur ne souffrit qu’en apparence la mort et la passion. Pour Cerdon, Jéhovah est un démon, et Satan son concurrent. Basilide voit un Dieu inconnu, Abraxas. Les lettres grecques qui composent son nom donnent 365 jours de l’année, émanations de Dieu, président des mondes intellectuels. Tout cela constitue le Plerôme, Dieu complet et organisé dans la connaissance et la grâce. Le mal est une prédestination. Les Docètes ne voient en Jésus-Christ qu’un fantôme divin. Marcion voit trois puissances le Dieu, le Créateur du monde et le Demiurgos. L’Eon Christos