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considère qu’elle est la dernière phase du processus phénoménal et qu’elle ne peut se trouver dans les premières, seulement parce qu’elle est la dernière, et qu’elle est produite par le processus entier, non par une de ses parties. »

Et M. Sergi conclut : « Le phénomène conscient est dérivé et composé d’éléments inconscients, et l’on peut dire que le phénomène psychique est composé d’éléments physiques. »

Il reste à montrer comment les phénomènes psychiques dans leurs manifestations à la conscience sont une résultante du processus psychophysique.

Un phénomène psychique, comme nous l’avons vu, a trois phases ; la dernière phase seulement est marquée par l’apparition de la conscience, et nous ne connaissons que la fin du processus, qui nous apparaît comme isolée et séparée de ses antécédents. Mais c’est là une pure apparence dont les recherches de la science ont montré la vanité et qui d’ailleurs n’est pas particulière aux phénomènes psychiques. Souvent, un phénomène physiologique, physique ou chimique ne se manifeste à nous que par son résultat, et ce résultat n’est pas un mode de mouvement, bien que le phénomène soit un mode de mouvement. Le chlorure d’argent préparé dans l’obscurité et conservé dans l’obscurité est blanc ; exposé à la lumière, il prend rapidement une coloration violette. Cette coloration est l’effet d’une décomposition chimique. Nous trouvons ici, comme dans le phénomène psychique, un processus et un résultat. Ce processus physico-chimique se ramène sans doute à un mode de mouvement ; mais la coloration est bien différente : « elle n’est plus le processus en mouvement, elle est la manifestation du processus arrivé au terme. » Dans les phénomènes chimiques, les combinaisons, les décompositions, on découvre ainsi un processus et un résultat, et le résultat n’est pas semblable au processus, en ce qu’il n’est pas comme lui un mouvement, en ce qu’il n’est peu au moins un mouvement de même nature.

Cependant, et ceci est vrai des phénomènes psychiques comme des phénomènes physiques, le phénomène complet ne peut que logiquement se séparer en plusieurs parties le processus du phénomène doit avoir un terme, et ce terme est la dernière phase du processus.

Ainsi le fait de conscience est au phénomène psychique ce que le changement de couleur d’un sel d’argent est au phénomène chimique et, si la conscience considérée en elle-même n’est pas réductible au mouvement, le phénomène psychique, lui, est un mode de mouvement, dont la phase consciente est le résultat et la manifestation.

On ne peut méconnaître ce qu’il y a d’ingénieux dans cette dernière partie du travail de M. Sergi. Il a fait en somme une tentative intéressante et sérieuse pour rattacher les faits psychologiques à la physiologie, en réunissant plus étroitement la conscience à ses conditions physiques. On peut toutefois lui faire plusieurs objections. Il néglige une des plus communes : le rapport de l’étendu et de l’inétendu. De plus, sa théorie sur le rôle de la conscience dans le phénomène psychique n’est