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j. delbœuf. — le dernier livre de g. h. lewes

avec lui. Il y en a qui manquent de persévérance et se rebutent aisément. Il y en a d’autres enfin qui ne se dérangent point : ce sont les malpropres et les paresseuses. On peut le voir encore à la manière dont elles entretiennent leur domaine. Mais toutes ont un procédé identique pour se débarrasser du poids qui les incommode. Elles trouent leur toile pour le tirer de leur côté, c’est-à-dire par dessous, et de là le laisser tomber. Celles dont la toile est verticale arrivent à le tenir écarté et l’abandonnent, comme je l’ai dit, à lui-même. S’il y retombe, j’en ai vu qui de chute en chute l’amenaient patiemment jusqu’en bas, d’autres qui renonçaient pour le moment à s’en défaire, d’autres encore qui démolissaient leur flet de fond en comble. Or, s’il était dans la nature des choses que des papiers frangés dussent souvent s’accrocher aux toiles des épéires, je ne doute pas qu’elles finiraient par user toutes du même procédé de nettoyage.

Les instincts sont le produit des circonstances. L’homme, cela se conçoit, a rarement l’occasion de voir des instincts naître sous ses yeux, se développer et devenir héréditaires. Cependant les pays nouvellement colonisés peuvent lui offrir cette observation. Voici ce que je lis, par exemple, dans la relation d’un voyage en Australie[1] : « …Nous rencontrons un troupeau de bœufs… et mon guide me raconte, au sujet de l’instinct de ces animaux dans le désert et dans les stations, des détails qui m’intéressent au plus haut point. Car ces instincts sont de nouvelle date… de plus, ils sont déjà héréditaires. Quand par exemple, dans une station, des troupeaux vont boire, il leur faut quelquefois faire cinq ou dix milles pour trouver de l’eau : c’est une longue course. Dans ce cas les vaches laissent leurs veaux derrière elles ; mais elles les conduisent d’abord dans un enfoncement de terrain, ou les cachent groupés au milieu de quelques broussailles, les confiant à la garde d’une vieille vache qui ne leur permettra pas de s’écarter. Cette vache au premier bruit, donne l’alarme, et, selon le cas, fuit avec son petit troupeau ou se précipite tête baissée sur l’intrus. »

Je poursuis l’analyse du livre de Lewes.

L’anatomie distingue des nerfs sensitifs, des nerfs moteurs et une substance centrale. Dans une machine aussi, on peut considérer séparément l’expansion de la vapeur, sa pression contre le piston. et le mouvement de ce dernier. Mais, dans le fait, sensibilité et contractibilité sont inséparables, de même que, dans la machine, l’expansion est la pression, et celle-ci, le mouvement.

  1. Par M. Charney. Tour du Monde, 1er sem. 1880, p. 94.