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herbert spencer. — les chefs politiques

rien qui leur serve de lien social, ni régime républicain, ni régime patriarcal. Les liens de la famille même sont très lâches parmi eux… il n’y existe point de droit pour les vieux de passer avant les jeunes, et l’âge ne paraît jouir chez eux d’aucun respect. » Enfin, à l’appui de ce fait, je puis ajouter, comme je l’ai fait voir ailleurs, que les Mantras, les Caraïbes, les Mapuchés, les Indiens du Brésil, les Gallinoméros, les Chochones, les Navajos, les Californiens, les Comanches, qui se soumettent peu ou point du tout à l’autorité d’un chef, ne témoignent que d’une soumission filiale faible et de courte durée.

Voyons maintenant sous quelles circonstances le respect pour l’âge prend la forme prononcée qu’on voit dans les sociétés caractérisées par une subordination politique prononcée. On a vu que lorsque des hommes, passant de l’état de chasseurs à celui de pasteurs, se sont mis à changer de lieu en quête de pâturages pour leurs animaux domestiqués, ils passèrent à une condition favorable à la formation du groupe patriarcal, à la fois famille et société en miniature, base de l’unité de composition de société, qui arrivent au plus haut période de l’évolution. Nous avons vu, que dans la horde pastorale primitive, l’homme, affranchi des anciennes influences de tribu qui contrarient la puissance paternelle et qui empêchent l’établissement de relations réglées entre les sexes, s’est trouvé dans de bonnes conditions pour réaliser l’institution d’un chef d’un groupe uni : le père est devenu, « par le droit du plus fort, chef, propriétaire et maître de sa femme et de ses enfants, et de tout ce qu’il menait avec lui. » Nous avons énuméré les causes qui ont fait du mâle le plus âgé un patriarche ; et nous avons vu que les Sémites, les Aryens et les Touraniens ne sont pas les seuls à fournir des exemples de cette relation entre les habitudes pastorales et l’organisation patriarcale, et qu’on en retrouve chez les peuples du sud de l’Afrique.

Quelles qu’en soient les causes, néanmoins, nous avons des preuves nombreuses que cette suprématie du mâle le plus âgé dans la famille, commune chez les peuples pasteurs et ceux qui ont traversé âge pastoral pour entrer dans l’âge agricole, se transforme naturellement en suprématie politique. Chez les Santals, dit Hunter, « le gouvernement du village est purement patriarcal. Chaque hameau a un fondateur primitif (le Manjhi-Hanan), qu’on regarde comme le père de la communauté. Il reçoit des honneurs divins dans le tombeau sacré et transmet son autorité à ses descendants. » Dans la famille composée des Khonds, dit Macpherson, « l’autorité paternelle est à peu près absolue. C’est une règle que le père d’un homme est son dieu ; et la désobéissance à ce dieu est ! e plus grand