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darmesteter. — les cosmogonies aryennes

Tel encore, dans la Veillée de Vénus, Ether, qui le premier « s’unit en hymen pour ranimer au printemps l’année sous les nuées créatrices, s’épand en pluie conjugale au sein de l’épouse nourricière et brûle de porter la vie au grand corps où il se mêle :

Cras et is, qui primus Æther
     Copulavit nuptias,
Ut paternis recrearet
     Vernus annum nubibus,
In sinum, maritus imber,
    Fusus almæ conjugis,
Inde vitam mixtus ardet
    Ferre magno corpore. »

Dans toutes ces descriptions, il est vrai, c’est de la création annuelle qu’il s’agit, de la création printanière, non de la création première. Mais le monde est né de la même façon qu’il se renouvelle[1], et le même hymen qui dans la série des temps le ranime, au début des temps l’a animé. Dans la théogonie d’Hésiode, la Terre au large sein est le premier être qui sort du Chaos, et elle produit d’abord le Ciel étoilé, aussi grand qu’elle-même, qui l’enveloppe de toutes parts et à qui unie elle enfante l’Océan, et les Titans et Thémis et Mnémosyne, c’est-à-dire les eaux de l’atmosphère, avec les génies lumineux ou orageux qui s’y révèlent, et les voix de sagesse qui en descendent[2]. L’hymen de la Terre et du Ciel fut le premier Hymen : c’est le prototype du mariage, le mariage divin par excellence, le γάμος[3].

§ 29. Selon un mythe recueilli par Euripide, au commencement du monde, Ciel et Terre ne faisaient qu’un, et plus tard, en se séparant, produisirent tout ce qui est :

« Le Ciel et la Terre, fait-il dire à Mélanippe[4], ne présentaient qu’une

  1. Non alios prima nascentis origine mundi
    Inluxisse dies aliumve habuisse tenorem
    Crediderim : ver illud erat, ver magnus agebat
    Orbis. (Georg., II, p. 336).

  2. Cf. § 38.
  3. Alii dicunt favere nuptiis Cererem, quod prima nupserit Jovi et condendis urbibus præsit, ut Calvus dicit :

    Et leges sanctas docuit et cara jugavit.

    Corpora connubiis et magnas condidit urbes (Servius ad Georg., IV, 58).

    La cosmologie Océanique dédouble, par analogie, l’élément humide en Océan père et Téthys mère (Iliade XIV, 202) : de leur hymen naît le monde.

  4. Οὐρανός τε γαῖά τ’ἦν μορφὴ μὶα·
    ἐπεὶ δ’ ἐχωρίσθησαν ἀλλήλων δίχα,
    τίκτουσι πάντα κἀνέδωκαν εἰς φάος·
    δένδρη, πετεινὰ, θῆρας, οὕς θ' ἅλμη τρέφει,
    γένος τε θνητῶν.