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Dr g. le bon. — la question des criminels.

Dieu ! que c’est donc bon de voler ! Quand même j’aurais des millions, je voudrais encore être voleur, » ai-je entendu dire à un jeune coquin.

« Tous ceux qui ont étudié les criminels savent qu’il existe une classe distincte d’êtres voués au mal dont la horde se rassemble dans nos grandes villes au quartier des voleurs, se livrant à l’intempérance, au vice, à la débauche, sans souci des liens du mariage ou des empêchements de la consanguinité et propageant toute une population criminelle d’êtres dégénérés. Car c’est encore un autre fait d’observation que la classe criminelle constitue une variété dégénérée ou morbide de l’espèce humaine marquée par des caractères particuliers d’infériorité physique ou mentale. Cette sorte d’individus, a-t-on justement dit, est aussi distinctement reconnaissable de la classe des ouvriers honnêtes et bien nés qu’un mouton à tête noire l’est de toutes les autres races de mouton. »


L’auteur conclut, ainsi, du reste, que ceux qui ont étudié sérieusement la question, que l’amélioration des criminels est la plus irréalisable des chimères : « Une véritable réforme impliquerait la réformation du naturel de l’individu. Mais comment ce qui s’est formé par la succession des générations pourrait-il se réformer dans le cours d’une seule vie ? Un More pourrait-il changer sa peau et un léopard ses taches ? »

Tout en partageant d’une façon générale l’opinion très juste qui précède, je crois que l’auteur, de même du reste que les autres médecins légistes, la plupart fort peu psychologistes, n’a pas su établir entre les criminels certaines distinctions fort importantes. L’hérédité est assurément un des principaux facteurs de la criminalité ; mais, si l’on nait souvent criminel, on le devient aussi quelquefois. Comment le devient-on ? C’est là ce que nous allons essayer de montrer.

Au point de vue psychologique, j’établirai d’abord deux grandes classifications, tout à fait tranchées, entre les criminels : 1o les criminels par suite de dispositions héréditaires ; 2o les criminels par suite de lésions acquises. Ces deux grandes classes fondamentales comportent elles mêmes comme nous allons le prouver maintenant, des subdivisions tout à fait tranchées.

En tête de la catégorie des criminels par dispositions héréditaires se placent naturellement les individus dont les dispositions vicieuses qui se transmettent régulièrement de père en fils et qui finissent généralement en prison, au bagne ou sur l’échafaud. C’est parmi eux que se recrutent une grande partie des criminels. Les moyens répressifs n’ont absolument aucune action préventive sur eux ; la crainte de la peine de mort seule les empêche quelquefois d’aller