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mouvement d’un nerf sensitif en mouvement d’un nerf moteur, sicut undulatione reflexa. L’auteur arrive ensuite à Gall et à Spurzheim, dont il examine le système assez longuement pour la raison suivante : « Il aurait été assurément presque inutile de s’arrêter aussi longtemps sur ce sujet, » — la chose est sûre — « n’était qu’il y a probablement encore, dans le grand public, beaucoup de personnes qui, si elles ne croient pas réellement à la phrénologie de Gall et Spurzheim, seraient bien aises de savoir les raisons positives qui doivent faire rejeter le système. » (p. 148.)

Apparaît alors la théorie propre des localisations. Flourens pensait qu’il n’y a danse le cerveau de siège distinct ni pour les diverses perceptions ni pour les diverses facultés. De nos jours, Brown-Sequard et Goltz soutiennent la même opinion, tandis qu’Hitzig, Ferrier et M. Charcot, pour ne citer que quelques noms, professent la doctrine des localisations. Contre Flourens, M. Bastian écrit d’abord avec un grand sens — et il faut citer tout le passage, très important, à mon avis — : « S’il nous faut regarder le cerveau comme le principal organe de l’esprit et considérer chaque opération mentale comme une des manifestations de son activité fonctionnelle, toute analogie, et même toute probabilité, nous amènera à conclure qu’un ordre défini doit être observé, et que des opérations mentales seront toujours associées à l’activité fonctionnelle de régions identiques des fibres et cellules nerveuses du cerveau et de ses dépendances. Nous savons que les nerfs olfactifs, optiques et auditifs vont chacun à des parties différentes du cerveau ; de sorte que les processus primaires en relation avec l’exercice des sens correspondants sont distincts les uns des autres. Pouvons-nous croire que, dans leurs phases postérieures ou plus élevées, les régions affectées à ces impressions deviennent moins distinctes ?.… Mais, si ce raisonnement s’applique aux opérations sensorielles, il est également bon pour les opérations et les émotions intellectuelles. L’ordre et la régularité ne sauraient guère faire défaut dans l’accomplissement des fonctions de ces parties du cerveau où, d’après la nature subtile et la multiplicité des actions moléculaires comprises dans des myriades de cellules et de fibres, ces caractéristiques particulières des actions cérébrales inférieures sembleraient encore tellement plus nécessaires. » Mais la localisation peut se faire dans et par une région séparée et délimitée de la substance cérébrale ou seulement par des arrangements mécaniques distincts de cellules et de fibres qui peuvent être entremêlées avec d’autres cellules ayant des fonctions différentes. En ce dernier sens, M. Brown-Séquard lui-même admet des localisations. Mais, à vrai dire, celles-ci, ainsi entendues, sont-elles bien des localisations ? « Tandis qu’une localisation topographiquement séparée de facultés indépendantes, écrit M. Bastian, semble à l’auteur tout à fait improbable, il est pleinement convaincu que certaines portions des hémisphères cérébraux, les lobes antérieure par exemple, sont toujours intéressées dans l’accomplissement d’opérations intellectuelles et voli-