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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Thury. — Une hypothèse sur la succession des espèces. In-8o, Genève, 1882.

Huit ans avant la publication du livre de Darwin sur l’origine des espèces, qui a révolutionné les sciences naturelles et qui forme la base d’une philosophie aujourd’hui très accréditée, M. Marc Thury, professeur de botanique à l’Académie (aujourd’hui l’Université) de Genève, a proposé, sur le lien des faunes successives[1] une hypothèse qu’il rappelle lui-même trente ans plus tard à l’attention du public[2], et qui nous semble mériter en effet de l’arrêter quelques instants,

M. Thury nomme espèces successives deux espèces dont l’une se montre après que l’autre s’est éteinte et continue en le modifiant le type de la plus ancienne. Pour voir si l’on peut admettre l’existence d’un lien organique entre les espèces successives, ou en d’autres termes admettre que l’espèce subséquente renferme de la matière provenant de l’antécédente, il prend cette idée de lien organique comme genre et s’applique à la diviser complètement, « afin d’ouvrir, s’il est possible, tous les chemins où elle conduit, »

Et d’abord toute la matière de l’antécédente passe dans la subséquente, l’individu se modifie au cours de la vie et transmet le changement à son germe, C’est l’hypothèse de Lamarck reprise et fortifiée par Darwin au moyen de la double sélection et d’une incalculable profusion de siècles. Dans son premier mémoire, M. Thury ne croyait pas nécessaire de réfuter Lamarck. Il renvoyait le lecteur aux arguments sur ce sujet résumés au quatrième volume des Principes de géologie de Lyell, de ce Lyell dont la théorie sur les changements de l’écorce terrestre s’est montrée d’un si grand secours aux partisans de la descendance.

Aujourd’hui, l’aspect du champ de bataille est complètement changé : il est impossible d’introduire aucune idée nouvelle sur ces matières, sans avoir préalablement réglé compte avec le darwinisme. Cette discussion remplit un peu plus du second mémoire. Tout en rendant hom-

  1. Bibliothèque universelle de Genève. Archives des sciences physiques et naturelles, no du 17 juillet 1851.
  2. Même recueil, no du 15 février 1882.