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C. VIGUIER. — le sens de l’orientation

auteurs qui se sont occupés de ce sujet difficile sont fort loin de s’entendre sur les fonctions des canaux, non plus que sur la nature de leur excitant physiologique. Nous devons passer en revue leurs opinions diverses ; mais, auparavant, il sera bon de rappeler sommairement la disposition de ces organes.

Chez l’homme, les canaux semi-circulaires sont des conduits étroits, creusés dans le rocher, et dont chacun décrit à peu près un demi-cercle. Ils ont une section légèrement elliptique[1], et se renflent en ampoule à une de leurs extrémités. Les plans de ces trois canaux sont perpendiculaires entre eux. On a donné à ces organes, d’après leur position, les noms de canal horizontal, canal vertical antérieur — ou supérieur, et canal vertical postérieur — ou inférieur. La disposition de ces organes est constante chez tous les vertébrés. Ce n’est que chez les poissons inférieurs que l’on observe une dégradation de cet appareil. Il n’y a plus que deux canaux chez les Lamproies et un seul chez les Myxines. Enfin, il n’en existe pas de traces chez l’Amphioxus. On ne connaît non plus rien d’analogue chez les Invertébrés[2].

Le plan des canaux horizontaux est à peu près exactement horizontal dans la position ordinaire de la tête, chez tous les animaux ; chez l’homme, il faut que la tête soit légèrement penchée en avant pour que l’horizontalité des canaux soit parfaite. Dans tous les cas, le plan de ces canaux est exactement perpendiculaire au plan médian du corps. Les deux canaux verticaux font des angles à peu près égaux avec ce plan médian, de sorte que le supérieur d’un côté

    des racines distinctes. Le professeur Stieda, de Dorpat, a décrit avec beaucoup de détails cette double origine de la 8e paire (voy. la thèse de M. Cyon, p. 97).

  1. Le grand diamètre de la section perpendiculaire est 1 mill. 7, et le petit 1 mill. 3.
  2. Relativement à la théorie que j’expose, on peut observer que les Lamproies et les Myxines vivent ordinairement fixées sur leurs victimes ; et c’est ainsi que l’on voit les premières remonter les rivières à l’époque du frai, principalement portées par les Aloses. Quant à l’Amphioxus, il vit enfoui dans le sable : et un organe de direction ne lui servirait évidemment à rien. Pour ce qui est des Invertébrés, la question est plus délicate ; mais, bien que M. Lubbock et d’autres auteurs pensent que les abeilles et les guêpes se retrouvent à l’aide d’un sens de direction, on n’a encore invoqué aucun fait absolument inexplicable à l’aide des autres sens : et tous les cas de retour bien constatés et de migrations régulières (on ne saurait donner ce nom aux voyages accomplis par les vols de sauterelles et de papillons) ont été observés chez des vertébrés. Je n’ai trouvé qu’un seul fait relatif à des crabes, pris et marqués par des pêcheurs ; et qui, après s’être enfuis, seraient revenus se faire pêcher à nouveau dans le même endroit (W. Cox, Nature, 8 avril 1873). Même en admettant l’observation comme bien prouvée, le fait, bien qu’intéressant, ne me paraît pas de nature décisive ; car la distance indiquée est assez faible pour que des animaux coureurs, comme les crabes, connussent déjà le terrain.