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LE SYLLOGISME ET LA CONNAISSANCE[1]


Le développement de date récente des doctrines de l’école anglaise nous fait assister à ce spectacle : un renouvellement des notions psychologiques entraînant la transformation des aperçus dans tous les ordres de questions qui se rattachent par un lien plus ou moins étroit au problème de la connaissance. L’ensemble de ces questions, c’est le domaine philosophique tout entier. La théorie du syllogisme, dont l’autorité semblait garantie, depuis l’apparition de la doctrine péripatéticienne, par l’assentiment des écoles les plus opposées, n’a pas échappé à ce travail de révision et de critique. La contestation est devenue si formelle, que le dernier jugement porté sur cette forme logique par les partisans des nouvelles doctrines est la conclusion suivante, énoncée par M. Spencer : Le syllogisme est une impossibilité psychologique[2].

Suivant la définition d’Aristote, le syllogisme est une expression de la pensée dans laquelle certaines choses énoncées sont condition suffisante de la chose énoncée ensuite : « Syllogismus est oratio in qua, quibusdam positis, aliud quid necessario consequitur eo, quod illa sunt[3]. »

Être la condition suffisante d’une chose, c’est là ce qui caractérise les données du syllogisme, d’où dépend la conclusion. Mais, pour une seule conclusion, il existe toujours une infinité d’hypothèses qui peuvent jouer le rôle de condition suffisante et dont la supposition a pour effet de rendre cette conclusion nécessaire. Alexandre est

  1. Une étude de M. Brochard, publiée dans les nos de la Revue philosophique de novembre et décembre 1881, sous le titre : La logique de Stuart Mill, a posé avec éclat la question du syllogisme et établi dans les limites qui nous paraissent exactes la valeur et l’authenticité de ce mode de raisonnement. Nous avons cru l’occasion favorable pour présenter à notre tour quelques observations, arrêtées depuis longtemps dans leur forme générale et qui contiennent peut-être un aperçu nouveau, de nature à éclairer et à confirmer la conclusion si brillamment exposée par M. Brochard.
  2. H. Spencer, Principes de psychologie, § 305, trad. Ribot et Espinas, tome II, p. 97.
  3. Premiers Analyt., I, ch. I, § 5.