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E. PANNIER. — syllogisme et connaissance

La forme parfaite des propositions est l’équation. Tout jugement peut se ramener à cette forme. Une définition est une équation le verbe être, qui en réunit les deux termes, est le signe de leur équivalence. Quant aux autres propositions, dans lesquelles le sujet est seulement qualifié par un attribut, ce sont des définitions incomplètes. Pour rétablir l’égalité de détermination entre les termes et ramener le verbe être à son premier et véritable sens, il faut sous-entendre un symbole qui étend le sujet ou restreint l’attribut. Par exemple, cette proposition Alexandre est mortel, doit s’analyser ainsi Alexandre est un certain être mortel[1].

Étant données ces explications, on peut définir le syllogisme : un acte par lequel nous effectuons, dans une proposition, une substitution convenue dans une autre proposition. La majeure annonce la substitution, la mineure la subit, la conclusion en présente le résultat.

Conclure du général au particulier est une des applications du syllogisme. La majeure, en termes universels, prévoit une substitution la mineure exprime un des cas où cette substitution est possible. Mais on peut arriver à une conclusion dans des conditions différentes, alors que les deux prémisses ont la même étendue, que la mineure épuise tous les cas de substitution prévus par la majeure. Les trois propositions, majeure, mineure et conclusion, constituent alors trois définitions équivalentes, composées de termes égaux ; chacune de ces propositions peut jouer alternativement le rôle des deux autres

or A est C,
or B est A,
donc B est C,
(ou vice versâ.)[2]

Le propre du syllogisme est de n’avoir égard qu’à la forme des propositions et de demeurer étranger à l’acte de la connaissance. De ce que tous les hommes sont mortels et de ce qu’Alexandre est homme, il résulte qu’Alexandre est mortel. De ce que tous les hommes sont immortels et de ce qu’Alexandre est homme, il résulte qu’Alexandre est immortel. Les deux conclusions sont également valables. Si la présentation de l’une provoque une adhésion de la part de l’esprit,

  1. Équations, propositions, jugements, sont au fond la même chose, et « par conséquent on raisonne de la même manière dans toutes les sciences. Condillac, La Logique, ch. 8.
  2. Comme exemples on peut citer toutes les applications du syllogisme appelé par l’ancienne École : expositorius, dans lequel le terme moyen est un terme singulier, comme celui ci Socrate est le maître de Platon. Or cet homme est Socrate. Donc… etc.