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en quelle mesure elle bénéficie de l’existence d’individus de ce genre et comment le problème est modifié par l’état du développement social. Il en résulte un échange de relations entre les spécialistes et par suite une coordination et une organisation des résultats. Un esprit bien doué, pénétrant sur un domaine étranger, y voit beaucoup de choses qui avaient échappés aux spécialistes, par exemple Gœthe abordant les sciences naturelles. Les savants, en abordant diverses questions philosophiques, leur donnent une nouvelle fraicheur, etc. L’auteur croit que, à mesure qu’un progrès se fait dans le sens de la spécialisation, un autre se fait aussi dans le sens de la versatility.

Quant à l’équivalent physiologique de cet état, on peut à peine faire de vagues conjectures. Peut-être peut-on affirmer qu’il suppose une organisation nerveuse fine, avec un développement complet et égal des diverses régions du système supérieur, central et périphérique, avec plénitude d’énergie nerveuse et rapidité d’action.

E. Montgomery. La causalité et ses conditions organiques. (1er et 2e articles). — Nous ne sommes conscients que de notre état présent qui constitue notre hic et nunc. Qu’est-ce donc qui produit les changements ? Sont-ce nos états de conscience comme tels qui ont cette efficacité ? La thèse soutenue par l’auteur, c’est que les éléments qui constituent notre personnalité, aussi bien les éléments centrifuges que les éléments sensoriels, sont inefficaces, Il y a sous la conscience « une matrice non mentale » inconsciente. « Un substratum unitaire et organisé doit être la base de l’apparition ordonnée et systématisée des faits mentaux particuliers. » C’est dans ce substratum qu’est, pour nous et les autres êtres, l’existence permanente. Si les états de conscience ne sont pas produits par des forces en dehors de la conscience, il faudrait alors qu’ils sortissent du néant.

Expérimentalistes et transcendentalistes montrent un zèle égal à établir que le monde ne consiste que dans de l’esprit ; les savants eux-mêmes inclinent à ce monisme ; mais l’auteur ne voit dans les états de l’esprit que des effets. Il résume ainsi sa discussion : « La présence mentale dépend de forces extra-mentales ; tous les états mentaux sont des effets et rien que des effets. »

L’auteur combat l’idéalisme, l’idéalisme nominaliste et l’idéalisme transcendental, et il touche à la question de la causalité, « dont la signification fondamentale est le rapport d’effets conscients manifestes à des causes cachées et inconscientes, comme à leur source originelle ». Toutefois, avant de l’aborder, il étudie en détail le problème de la perception du monde extérieur tel qu’il la conçoit. Il rejette la théorie du « réalisme transfiguré » de M. Spencer. « Les propriétés des existences externes ne sont pas reproduites, même au degré le plus lointain, dans le milieu organique par la stimulation. Elles ne peuvent en aucune façon donner d’elles-mêmes une projection transfigurée. »

Il appelle sa théorie un « réalisme transcendental », à condition de comprendre « que la chose en soi et sa causalité ne doivent être consi-