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FOUILLÉE. — expédients en faveur du libre arbitre

vue psychologique et métaphysique. Les mathématiques, d’ailleurs, ne s’appliquent qu’aux rapports extérieurs des choses, sans nous en révéler l’intérieur. Elles ressemblent à ces bouliers dont on se sert pour apprendre le calcul aux enfants : ceux-ci se bornent à compter les boules, sans se préoccuper de savoir si elles sont noires ou blanches, si elles sont en bois ou en fer. Tous les arguments mécaniques que nous avons passés en revue sont donc une série de paralogismes. On ne trouverait d’ailleurs dans cette voie que la liberté d’indifférence, c’est-à-dire le hasard, c’est-à-dire au fond la nécessité. Ce n’est pas en remuant le bras à droite ou à gauche, ni en dessinant des arabesques fantastiques, qu’on peut démontrer l’existence ou la non-existence d’un pouvoir tout moral. Ce n’est pas davantage à la logique et aux intérêts de la science qu’il faut demander la preuve de ce qui serait, par définition même, un miracle au point de vue de la logique comme de la mécanique ; le libre arbitre. Enfin, une considération générale condamne d’avance à la stérilité tout effort pour produire des changements dans l’espace par l’action d’une pure idée ; c’est que toute idée, en fait, est accompagnée d’un mouvement et est une action réfrénée, un mouvement suspendu et maintenu à l’état moléculaire. Toute idée est en même temps une force.


Alfred Fouillée.