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ANALYSES. — CH. BASTIAN. Le cerveau.

l’origine de la conscience sans essayer de déterminer la part qu’y prend la mémoire, tandis que son attention devait être attirée sur ce sujet par les théories de Taine, de Herzen, qu’il n’ignore certainement pas.

Dans le chapitre sur les mouvements volontaires (ch. XXVI), on ne trouve rien sur les tubercules quadrijumeaux. Cette partie du cerveau pourtant, d’après M. Beaunis (voy. Eléments de physiol., 2e édit., p. 1315), paraît être un centre pour les mouvements qui sont en relation avec les impressions visuelles.

Mais, à prolonger cette énumération critique, on aurait mauvaise grâce, quand il s’agit d’un ouvrage aussi étendu et aussi complexe que celui-ci. Dans presque toute œuvre de longue haleine, il y a des lacunes ; sa valeur propre n’en diminue guère pour cela.

Les premiers chapitres sont consacrés à des généralités. L’auteur détermine la différence entre le végétal et l’animal d’après le caractère de simplicité relative des actions chimiques liées à la nutrition des plantes et d’après l’existence chez celles-ci de simples mouvements de croissance, et non de mouvements de relation, destinés par exemple à la recherche de la nourriture. Là même est la raison qui permet de comprendre pourquoi un système nerveux fait défaut chez les plantes. La question de l’origine du système nerveux se présente ainsi dans un rapport étroit avec celle de l’origine de la vie. Comment le premier protoplasme organisable paraît-il ? et comment se fait la différenciation entre les formes végétales et les formes animales ? Sont-ce là pour M. Bastian choses de pure métaphysique et, par conséquent, négligeables pour le savant ? Au moins fallait-il prononcer cet Ignorabimus. De même, l’auteur explique plutôt qu’il ne résout le problème de l’origine du système nerveux. On comprend avec H. Spencer, à qui il fait appel, la correspondance graduelle entre l’organisme et le monde extérieur ; mais c’est le point de départ de cette correspondance qu’il faudrait voir. — La nature de l’acte nerveux est mieux expliquée. On peut considérer comme le schéma général de tout système nerveux le schéma de l’action réflexe. — Ici se place une étude des éléments constituants du système nerveux : fibres, cellules, ganglions, relations entre les fibres et les cellules, unions entre les cellules. Il y a peu de chose sur la substance grise et très peu sur le protoplasme cellulaire, dont la physiologie, qui a été étudiée de nos jours, est cependant fort importante. En revanche, beaucoup d’anatomie descriptive.

Au chapitre III, le développement des organes des sens est présenté en conformité avec les idées d’H. Spencer. Ainsi il convient de voir dans les chocs ou impulsions mécaniques d’une nature quelconque sur la surface externe de l’organisme, auxquels répond l’irritabilité du protoplasme, l’origine du sens du toucher ; dans l’influence unilatérale de la lumière et dans les mouvements attractifs ou répulsifs auxquels elle donne lieu, surtout lorsque quelques points de la surface antéro-supérieure de l’animal présentent des agrégations de pigment, l’origine du sens de la vue, sorte de tact anticipé, dit H. Spencer. Même pro-