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revue des périodiques.

sur Hume, est muet sur Sidgwick. En somme, suivant M. de Gizycki, l’histoire de l’utilitarisme est encore à faire. À la critique générale de la morale utilitaire, il reproche d’être un peu arriérée ; elle semble dater de Descartes : Guyau est plus moderne. Enfin la morale intuitionniste que M. Carrau préconise, ne tient point, selon lui, devant la critique qu’en a faite Sidgwick. — Malgré tout, l’ouvrage est de grand mérite, bien écrit, et il faut en recommander également la lecture aux amis et aux adversaires de l’utilitarisme.

Schubert. De la notion de l’être, spécialement chez Beneke. — L’auteur ne se soucie pas de porter l’une des étiquettes favorites des philosophes actuels : pour Kant ou contre Kant ; les noms lui sont odieux ; il faut laisser là les dogmatismes et chercher à nouveau. Beneke est un exemple des erreurs où mène une opinion préconçue.

La notion de l’être est la notion dogmatique par excellence ; l’interprétation qu’on en donne est la source de toutes les erreurs dogmatiques. — Tout est ; le non-être n’est que relatif. L’être n’est pas propriété d’une chose, mais bien la présupposition, la première condition de cette chose ; la question de la cause de l’être ne tient pas debout, car une cause de l’être serait différente de l’être, ne serait pas, ce qui est absurde ; enfin il n’est point de différence, au point de vue de l’être, entre le monde des phénomènes et le monde de la réalité : ils sont tous deux, différemment.

Quels sont donc les sens du mot être ? — L’auteur étudie et critique chez Beneke l’être subjectif (être dans l’âme) et l’être extérieur : l’être unique, l’être premier que Beneke trouve dans la perception interne, n’est ni réel ni possible. — Par suite, la tâche de toute théorie de la connaissance, c’est de déterminer et de fixer les variétés, les catégories de l’être, de critiquer les fausses conséquences que l’on peut tirer d’un fait de conscience. Si l’on objecte que c’est là faire de la théorie de la connaissance une œuvre de pure imagination, il répond que c’est proprement imaginer que de fondre les variétés de l’être les unes dans les autres, que l’être en soi est une création de l’imagination, que la théorie réaliste n’est qu’un tissu de fantaisies.

Kries. Sur la mesure des grandeurs intensives et sur la loi dite psychophysique. — Y a-t-il, comme on le veut depuis Weber et Fechner, un rapport fonctionnel entre l’excitation et la sensation ? La sensation croit-elle proportionnellement au logarithme de l’excitation ou à l’excitation elle-même ? — Par une série d’exemples bien choisis et clairement exposés, l’auteur montre que, dans les sciences naturelles, mesurer des grandeurs intensives, c’est comparer des grandeurs dans l’espace ou dans le temps. Un tel procédé n’est naturellement pas de mise en psychologie. Comme il est impossible de mesurer une intensité comparativement à une autre, il est impossible d’établir directement une échelle quelconque dans les intensités, et l’on doit chercher au dehors la commune mesure, le terme de comparaison que l’on veut em-