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CHAUVET. — la médecine grecque

nes nomme et décrit quatre phthisies, quatre maladies des seins, quatre hydropisies, trois hypathies, cinq maladies de la rate, quatre ictères, six espèces de typhe (fièvre inflammatoire ?), trois espèces de passion iliaque, quatre espèces de grossissement (du ventre), quatre espèces de sciatique, trois espèces de tétanos, etc. On trouve des énumérations analogues dans le traité Des maladies : le traité Du régime des gens en santé présente encore le même caractère. Le particulier, sans rien de général ; l’observation, qui constate les faits sur les individus, sans le raisonnement qui, éliminant l’accidentel, détermine de véritables espèces morbides. C’est du reste le reproche qu’Hippocrate adresse à la médecine cnidienne, au commencement du traité Du régime dans les maladies aiguës. « Ceux qui ont recueilli les sentences cnidiennes, dit-il, ont bien décrit les symptômes dans chaque maladie particulière, et sa terminaison ; mais le premier venu, sans être médecin, en ferait autant, en s’informant près des malades de ce qu’ils éprouvent. Il est des choses que le malade ne peut dire, que le médecin doit savoir, et sans lesquelles on ne connaît ni le mal ni le remède qui lui convient. » Voilà de visibles traces d’une lutte dont l’histoire a consacré le souvenir entre Cnide et Cos et dont la méthode à suivre dans la détermination des maladies et des remèdes aurait été le principal objet. De sorte qu’il y a lieu de penser que Euriphon et les Cnidiens ont eu leur logique médicale, ce qui est une manière d’avoir une philosophie.

La philosophie médicale, si l’on peut ainsi dire, gagne du terrain avec l’école de Cos, autrement dit avec Hippocrate, qui la représente glorieusement.

Cette école, qui est sans contredit la grande école médicale de l’antiquité, est encore enveloppée d’ombres que ni l’érudition ni la critique ne sont en mesure de dissiper. La famille hippocratique, qui en est le centre et la lumière, est à peu près connue dans ses représentants et leur ordre chronologique. Un historien ancien, y mettant la dernière précision, et par cela même un peu suspect, nous donne la généalogie suivante : « Esculape, père de Podalire, père de Sostrate Ier, père de Dardanus, père de Chrysamis Ier, père de Thédore Ier, père de Sostrate II, père de Chrisamis II, père de Théodore II, père de Clomittadès, père de Sostrate III, père de Nebrus, père de Gnosidicus, père d’Hippocrate Ier, père d’Héraclide, père d’Hippocrate le Grand. » Nous avons d’autre part les noms des successeurs immédiats d’Hippocrate, savoir Polybe, son gendre, Thessalus et Dracon, ses deux fils. Mais dans l’école de Cos, comme dans les autres écoles asclépiadéennes, il y avait, outre les Asclépiades de naissance, les Asclépiades par initiation. Or, de ceux-là, on