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cette dernière, pour la mieux caractériser, une hypotypose[1]. — Il distinguait deux espèces de concours des symptômes, le concours dogmatique, lequel comprend une série de symptômes considérés comme essentiels, c’est-à-dire comme se rapportant à la nature du mal et la déclarant ; le concours empirique, lequel comprend une série de symptômes concomitants, c’est-à-dire qui paraissent ensemble, croissent ensemble, décroissent ensemble, disparaissent ensemble. Ce concours-là est la propre définition de la maladie ; un concours qui n’est pas constant est sans valeur pathologique. Dans le concours tel qu’il l’entend, l’empirisme distinguait encore le propre et le commun. Le propre, qui est plus compliqué, est celui qui ne représente qu’une seule maladie ; le commun, qui l’est moins, en représente plusieurs[2]. — Il distinguait de même différentes espèces de prévision, différentes espèces de traitement, etc.[3].

Tout ce travail logique ne s’était pas fait, bien entendu, en une heure et par les méditations d’un seul. Il s’était opéré petit à petit, par une action et réaction entre les partis adverses, et par les efforts successifs de leurs représentants. Sans la nécessité de faire face aux attaques du dogmatisme préconisant le raisonnement, et défiant ses rivaux de s’en passer, ceux-ci n’eussent sans doute pas songé à étudier l’expérience de si près et à en analyser toutes les diversités pour en montrer toutes les ressources. Sans la nécessité d’opposer à la rigueur systématique du dogmatisme une pareille rigueur, les empiriques n’eussent sans doute pas songé à distinguer l’hypotypose de la définition proprement dite, et le concours des symptômes concomitants du concours des symptômes essentiels. Mais là-dessus nous sommes réduits aux conjectures. Il est également impossible de déterminer la part de chaque ouvrier dans l’œuvre totale. Le dernier chapitre du traité De l’empirisme donne au lecteur une fausse joie. Galien annonce d’abord qu’il dira en quoi diffèrent les empiriques Sérapion, Ménodote, Héraclide et Teutas ; mais il nous entretient seulement ensuite de leur jactance, de leur orgueil effréné, de leurs violences et de leurs injures à l’égard des dogmatiques, sans excepter Hippocrate. Il faut recueillir ailleurs quelques indications douteuses

    passage du sang des veines dans les artères, ils disaient : La fièvre est une affection qui se manifeste par l’accélération du pouls, l’augmentation de la chaleur, accompagnée de soif.

  1. Gal., De l’empir., p. 7.
  2. La fièvre, la difficulté de respirer, la toux, des crachats colorés : voilà un concours commun qui convient à la fois à la pleurésie et à la péripneumonie ; ajoutez une douleur de côté aiguë, un pouls dur avec tension : voilà un concours propre qui ne convient qu’à la pleurésie.
  3. Gal., ibid., ch.  5.