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ANALYSES.frohschammer. Philosophie d’Aristote.

idée de cette publication nouvelle, et en dégager la pensée principale.

La première partie, l’Exposé des principes de la philosophie d’Aristote, malgré les mérites d’une exposition claire, exacte, élégante, et des observations de détail qui ne manquent ni de sagacité ni de justesse n’aurait rien à apprendre à qui est au courant des travaux récents sur la métaphysique et la philosophie d’Aristote, Mais la seconde, celle qui traite de l’imagination dans le système aristotélicien, de son rôle, de sa signification, est beaucoup plus instructive et offre un réel intérêt ; c’est à elle que nous devons nous attacher.

L’auteur nous dit d’abord (Préface) pourquoi il a choisi Aristote comme objet de son étude. Aristote est le fruit le plus mûr de la spéculation antique ; il a été le précepteur des âges suivants ; il a tracé la route à ceux qui sont venus après lui ; son influence sur la pensée humaine et sur toute la civilisation européenne a été immense. L’auteur aura beaucoup fait pour lui-même, sans doute, s’il parvient à montrer qu’en somme il n’a fait que suivre la ligne qui lui a été tracée par Aristote, il y a plus de deux mille ans, qu’au fond sa conception se retrouve chez celui dont la philosophie a régné pendant tant de siècles, que cette idée c’est le même principe qui relie toutes les parties du système d’Aristote et en fait la véritable unité.

Rien de plus habile et de plus ingénieux que la manière dont M. Frohschammer expose et soutient sa thèse. Il y fait preuve à la fois d’une solide érudition, d’une grande sagacité et d’une connaissance approfondie de l’œuvre d’Aristote. Mais, tout en reconnaissant qu’on trouve à le lire un véritable plaisir et un sérieux intérêt, nous ne pouvons nous empêcher de faire nos réserves sur la méthode qu’il emploie et qui, si elle lui réussit pour le but qu’il se propose, ôte, à son livre beaucoup de sa valeur historique. Il est des esprits difficiles et défiants envers cette même imagination dont l’auteur fait la souveraine du monde et dont tout son système est l’apothéose, Cette méthode se prête trop facilement au succès de toute entreprise semblable à la sienne ; elle a toujours été fort complaisante envers ceux qui s’en sont servis, comme lui, pour enrôler sous leur bannière les philosophes qui les ont précédés.

De ce que nous avançons, nous ne voulons pas d’autre preuve que la manière dont M. Frohschammer s’explique lui-même sur l’emploi de son procédé ; nous citerons ses propres paroles.

M. Frohschammer pose en thèse générale que le principe de la forme et du but (cause finale) ou, pour lui, l’imagination, est le principe d’unité (Einheitlichen) qui relie toutes les parties du système d’Aristote dans sa conception de l’univers. Or, voici comment il s’exprime : « Quand nous arrivons, dit-il p. 107, à préciser l’action de l’imagination dans le sens objectif et subjectif, comme principe d’unité de la conception de l’univers, chez Aristote, qu’il soit encore une fois expressément remarqué qu’il ne s’agit pas simplement d’exposer ce qu’Aristote lui-même soutient et expose précisément, mais aussi ce qui reste non développé dans ses