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ANALYSES.g. cattaneo. Le colonie lineari.

G. Cattaneo. Le colonie lineari et la morfologia del molluschi. (Bibliothèque scientifique internationale, Milan, Dumolard. 1883).

On pouvait croire il y a dix ans que jamais la morphologie des mollusques n’aurait le moindre rapport avec les questions philosophiques. Pourtant, s’il est vrai que les connaissances humaines forment dans leur ensemble un tout organique, il faut bien reconnaître que c’est dans le vaste champ de l’investigation scientifique que les solutions philosophiques s’élaborent. Ici, le rapport est des plus directs. La morphologie générale, depuis Hæckel et Spencer, a dû se poser le problème de l’individualité. Elle s’est demandé ce qu’est un individu au point de vue zoologique et quels sont dans la série animale les êtres simples et les êtres multiples. Elle a cherché à quels caractères se reconnaît, de quelles conditions dépend l’unité des uns et la multiplicité des autres. Il est évident que, si l’esprit a quelque lien avec l’organisme, le problème du consensus vital et le problème de l’unité psychique sont également connexes. Il n’y a pas un moi partout où il y a une substance vivante ; mais, comme le fait de se distinguer soi-même des autres est visiblement accompagné d’un certain degré de concentration organique, il ne peut être indifférent à ceux qui étudient cette manifestation essentielle de l’esprit de savoir à quelles conditions précises elle est possible. Maintenant la société est le concours d’un certain nombre d’individus, les êtres composés sont aussi chacun pour soi un être ; comment s’opère cette unité qui rallie à la poursuite d’un seul but des volontés distinctes ? Nouveau problème, bien digne d’intéresser les philosophes et que la morphologie ne peut se dispenser d’agiter, si tant est qu’il soit différent du premier, car quel être n’est pas un et multiple à la fois ? Lors donc qu’un naturaliste, discutant un point particulier des théories morphologiques, est amené à produire sa conception propre de l’individualité et à exposer de son point de vue les lois qui président au groupement des éléments organiques dans la série animale, coûte que coûte, les philosophes doivent le suivre dans ses recherches, sous peine d’en être réduits à répéter sur l’un et le multiple en général des formules qui satisfaisaient Platon et les Alexandrins, mais qui n’ont plus maintenant aucun sens.

Nous arrivons aux Mollusques. M. Perrier, pour qui tout animal individuel est en réalité une colonie, avait essayé dans son livre sur les Colonies animales de ramener les mollusques à ce plan unique. Nous avons montré sur quelles raisons Spécieuses cette partie de sa théorie s’appuyait. M. Cattaneo soutient au contraire que les mollusques ne sont pas des colonies, c’est-à-dire que la division du travail organique, qui est chez eux déjà poussée si loin, s’opère directement par le groupement des éléments histologiques, et non médiatement par le groupement de parties déjà organisées. Bref, pour lui, les mollusques sont non des agrégats d’animaux, mais des animaux simples. Pour établir cette thèse, l’auteur est obligé de discuter un à un les caractères auxquels se reconnaissent les animaux simples et les animaux multiples ; par là, son ou-