Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 16.djvu/553

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
549
revue des périodiques

qu’immanent au droit. » Elle doit montrer comment cette justice s’est réalisée dans les constitutions et le droit à travers l’histoire ; elle ne propose point un droit idéal, mais éprouve les diverses formes historiques en les rapportant à la notion du droit, et indique des vues sur la marche vraisemblable du droit dans son développement futur.

La volonté libre est la volonté rationnelle (Hegel) ; la liberté de la volonté est l’autonomie de la raison pratique ; le droit contraint la volonté, souvent malgré elle, à être rationnelle, c’est-à-dire libre ; il l’élève au-dessus du degré inférieur où elle est en proie aux impulsions naturelles ; il contient les passions et les combats dans leurs conséquences fâcheuses, quoiqu’il ne le puisse qu’imparfaitement. De là le progrès constant se faisant à travers les constitutions successives du droit, devenant à chaque pas plus étendues et compliquées. — Mais en même temps l’art, la science, la moralité, la religion, c’est-à-dire la vie intérieure de l’esprit, se soustraient sans cesse davantage à la réglementation stricte du droit qui étoufferait leur liberté.

M. de Hartmann critique cette identification de la liberté avec la conscience de la rationnalité de la contrainte, empruntée à Hegel. Il critique de même la notion du juste, qui, selon Lasson, se développe, devenant plus rationelle et engendrant à chaque pas des formes plus parfaites du droit ; cette marche ascendante et ce but final sont compris en un sens trop formel. Il critique encore sa théorie de la propriété, qui ne peut se déduire uniquement de ce principe conservateur, qu’on ne doit rien modifier sans une raison suffisante ; sa théorie de l’État comme € organisme moral », et sa réprobation d’un socialisme d’État, que M. de Hartmann juge beaucoup moins dangereux, et ne serait pas loin de trouver nécessaire ; et enfin sa théorie de la pénalité, où percent encore des souvenirs de la doctrine de Hegel.

V. Egger. La parole intérieure. Paris 1881. — L’auteur soumet la question des rapports de la pensée et de la parole à une recherche pénétrante et perspicace. On peut reprocher à l’auteur, outre un sensualisme exclusif, sa théorie, depuis longtemps renversée, de l’onomatopée comme premier degré du langage, et l’idée surannée du développement conscient du langage. Malgré ces restrictions, l’ouvrage est intéressant par les riches matériaux qu’il fournit au psychologue, et l’heureuse exposition de ce point encore peu approfondi.

E. Feuerlein. L’idée de la responsabilité et sa place dans le droit en politique et en morale. — Quiconque agit est responsable. La responsabilité suppose deux sujets, l’un qui demande, l’autre qui rend compte. Pour la première fois, cette idée se fait jour nettement dans le droit romain ; puis elle pénètre, grâce au christianisme, dans la conscience de l’humanité.

Les responsabilités dans le droit et en morale, quoique fondées sur le même principe, sont différentes. Dans le droit, ainsi qu’en politique,