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BEWAN LEWIS. — localisations cérébrales

les cas de folie chronique, par la localisation de changements atrophiques et autres de nature grossière, de déterminer la situation de désordres plus profonds et d’être ainsi conduits à l’origine des troubles primitifs ?

Les conditions précédentes nous font voir la vie mentale à haute pression, quoiqu’il ne s’agisse que des plans inférieurs de la conscience. Dans tous les cas de mélancolie simple, on trouve, à mon avis, des preuves d’une perte longue, continue, graduelle, d’énergie nerveuse, peut-être à peine appréciable dans son écoulement, mais suffisante pour réduire à un niveau très bas les plans inférieurs de la vie mentale. Et, comme cela se produit aussi dans les régions les plus hautes de la conscience, grâce à ses substrata, qui, par leurs intégrations excessivement complexes, renferment pour ainsi dire en eux-mêmes tous les groupes subordonnés, il doit s’en suivre nécessairement un abaissement universel de toutes les fonctions vitales : de là, diminution du pouvoir de réviviscence des idées, affaiblissement des émotions dont les manifestations deviennent instables et incohérentes, affaiblissement des désirs et de la volition, anorexie, paresse de la circulation, inertie des viscères. L’inévitable effet de cette condition, c’est un état de peine vague, de déconfort ou de désespoir absolu, qui se produit toujours quand le substratum cérébral de la conscience montre une diminution d’activité, Alors se produisent des périodes où il y a des décharges spasmodiques, aidées par la perte excessive du pouvoir d’inhibition ; les instincts les plus bas et les plus brutaux se font jour, tandis que l’agitation peut remplacer la torpeur et l’apathie précédentes ; cette onde de force nerveuse produite dans les plans inférieurs peut, pour emprunter l’expression de Herbert Spencer, entrer de force dans les tractus les moins perméables : de là résulte un délire agréable et joyeux.

D’où naît le désordre intellectuel grave et persistant qui, suivant une simple attaque de manie ou de mélancolie, aboutit aux formes diverses de faiblesse mentale consécutive et à l’état monomaniaque ? Comment arrive-t-il que, avec un calme soudain des émotions, l’intelligence devienne profondément affectée et le moi complètement transformé ? Pouvons-nous, appuyés sur des bases anatomiques, prédire de pareilles attaques ? Et cependant de pareilles recherches ne sont que sur les limites de nos études psychologiques

Maintenant, en passant de la simple dépression mélancolique aux états de mélancolie avec illusion, nous voyons que des dissolutions plus actives, produites dans les régions supérieures de la conscience, aboutissent à des états illusoires variés, car toutes les conditions d’illusion résultent de cet état de perte intellectuelle qui rend impos-