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ganglionnaire dans son activité fonctionnelle. Dans cette hypothèse, un registre cinesthétique d’une grande étendue serait intercalé entre les différentes couches d’éléments moteurs. Dans la proportion où les mouvements deviennent plus automatiques, cette kinesthésie s’en désintéresse, comme Charlton Bastian l’a dit en termes très clairs, On peut rapprocher de cette vue ce fait que la série de cellules granulées ou angulaires est encore moins évidente ou même totalement absente chez les mammifères inférieurs, comme le lapin, le rat, etc., ; là où il serait difficile d’admettre une activité de la zone motrice consistant en processus idéo-moteurs ou noético-kinétiques.

En ce qui concerne les régions préfrontales du cerveau, j’ai observé à plusieurs reprises des cas de démence sénile avec une dévastation excessive de ces régions, particulièrement accusée dans le lobe frontal : ils étaient accompagnés pendant la vie d’une torpeur et d’une somnolence extrêmes. Je me rappelle spécialement trois cas dans lesquels ces conditions existaient et où l’infirmière faisait constamment observer que le malade était toujours « tombant de sommeil » et dans lesquels, lorsqu’on était parvenu à obtenir une attention suffisante pour apprécier une question, le malade retombait endormi, en essayant de formuler une réponse. Ces faits sont intéressants en ce qui concerne la faculté d’attention, à qui l’on suppose que le lobe frontal serait dévolu.

Il y a aussi des cas où, comme l’enseigne Hughlings Jackson, une profonde démence accompagne des lésions des parties postérieures du cerveau : ce qui confirme l’observation de Rosenthal que les troubles psychiques résultant des tumeurs situées dans les lobes postérieurs sont beaucoup plus fréquents que ceux qui résultent d’états morbides correspondants dans les lobes antérieurs et médians.

Nous savons combien cela est vrai dans l’aphasie, où des lésions des centres sensoriels perceptifs entravent la faculté du langage. Enfin ne serait-ce pas une preuve à produire en faveur de l’hypothèse très importante, émise par Hughlings Jackson, que les parties gauches postérieures et droites antérieures du cerveau contiennent le substratum de la conscience subjective ; tandis que les parties droites postérieures et gauches antérieures représenteraient le substratum de la conscience objective ?

W. Bewan Lewis.