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ANALYSES.g. cesca. Storia e dottrina del criticismo.

historique, de ramener dans la partie critique des développements historiques qui font double emploi.

M. Cesca s’attache à montrer que le criticisme fut, quant à son objet et à sa méthode, la systématisation des recherches sur la valeur et les limites de la connaissance, et que la recherche critique, loin d’être indépendante de la recherche psychologique, devait la prendre pour base. De la solution du problème relatif à l’origine de la connaissance dépend celle du problème relatif à sa valeur. L’auteur réfute, avec un grand luxe de preuves recueillies dans maint auteur, l’apriorisme de Kant. Ce n’est pas l’apriorité des formes, mais leur priorité relative à nous, que ce philosophe a démontrée. Voilà le seul fait vrai de la théorie kantienne ; mais seule, la théorie psychogénétique a réussi à l’expliquer. Celle-ci, par l’a priori de la conscience, le seul qu’elle admette, nous conduit au principe de la relativité de la connaissance. L’auteur l’accepte sans aucune restriction. « La valeur de toute connaissance, dit-il, nous est relative ; la sensation et la perception ne sont que des signes de l’objet} extérieur, l’idée et le concept que des symboles de sensations, et par conséquent des symboles d’un signe de l’objet extérieur. » S’ensuit-il, comme l’entendent les phénoménalistes, que le monde est simplement notre représentation ? Il faut rejeter cette explication idéaliste. La genèse de notre représentation a pour condition première et absolue la chose en soi, le stimulus extérieur inconnaissable. Cette restriction faite au phénoménalisme, l’auteur énumère les applications de la relativité à la science, à la métaphysique et à la vérité. La science ne nous montre pas les lois de la chose en soi ; elle n’est qu’une construction idéale, limitée à la sphère de notre monde, où elle cherche seulement à mettre un peu d’ordre et de connexion. La métaphysique, construction idéale par excellence, se propose l’une des fins que lui attribue Angiulli, celle d’unir ensemble les résultats des sciences particulières. Prétend-elle aller au delà de l’expérience dans le monde des noumènes, elle n’est plus, comme Lange l’a dit, qu’une poésie sans valeur théorique, Examinant enfin les idées fondamentales qui servent de base à la science et à la métaphysique, l’auteur établit que substance, cause et fin ne sont que des concepts auxiliaires pour comprendre l’expérience et n’ont qu’une valeur toute relative. La matière, l’esprit, l’absolu, sont aussi de simples idées, sans réalité objective, purs éléments de construction idéale et d’interprétation d’expériences.

Ce fameux principe de la relativité de la connaissance a-t-il une aussi grande importance que l’auteur le prétend ? « Le criticisme, dit-il, avec la relativité de la connaissance, a établi le fondement de toute science et de toute philosophie, » — « Le criticisme, dit-il encore, n’est pas un système philosophique, ni une construction métaphysique, mais une méthode scientifique. » Malheureusement pour les philosophes criticistes, la science moderne était à peu près faite dans ses méthodes et avait accumulé ses plus merveilleux résultats, quand ils sont venus