Page:Riccoboni - Œuvres complètes, Tome 1, 1818.djvu/145

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dit-elle, à une fille assez malheureuse pour fuir la maison paternelle, de regarder comme à elle des dons qui ne lui ont pas été faits dans l’intention de l’aider à soutenir une démarche honteuse. Rien ne m’appartient ici, et je n’ai plus de droits à des biens dont je mérite d’être privée ». Lidy resta confuse à ce discours ; elle avoit déjà fait passer l’argent à Londres, mais elle n’osa l’avouer. Ladi Sara rassembla ce qui lui restoit de la somme annuelle destinée à son entretien et à ses plaisirs. Elle se trouva environ 500 liv. sterlings, et pour trois fois autant de bijoux à son usage. Ce fut tout ce qu’elle se permit d’emporter d’une maison où elle laissoit l’espoir de la plus grande fortune.

Prête à partir, elle sentit une douleur extrême, en songeant que peut-être elle ne reverroit jamais son père. Elle n’avoit point éprouvé de sa part cette tendre indulgence et ces douces caresses qui changent un respect imposé par l’éducation, entretenu par l’habitude, en une amitié vive et reconnoissante, en une préférence décidée ; sentiment que la nature n’inspire pas toujours. La bonté de nos parens le fait naître dans nos cœurs, et l’y rend chaque jour plus fort. La fierté du caractère de milord Alderson ne lui permettoit pas de se livrer à des mouvemens qu’il traitoit de foiblesse, et dont le charme lui étoit inconnu.

Sara lui écrivit d’une main tremblante ; ses expressions soumises, attendrissantes, imploroient sa pitié pour une fille coupable et malheureuse, qui, se voyant forcée à ne plus vivre sous ses yeux, se trou-