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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/34

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GŒTHE ET BEETHOVEN

resque du texte poétique ; c’était un accouplement avec la poésie, chair et âme mêlées. On n’a pas assez remarqué que les paroles fumeuses que lui prête Bettine, sur la poursuite de la mélodie, se rapportent précisément à la recherche de l’idée Gœthéenne, qu’il veut transfuser en musique :

« ... Du foyer brillant de Venthousiasme, je dois me décharger de la mélodie, elle s’échappe dans tous les sens 1. (Da muss ich denn von dem Brennpunkt der Begeisterung die Mélodie nach allen Seiten hin ausladen. (Je la poursuis, je Vétreins de nouveau avec passion, je la vois fuir et se perdre dans le chaos des impressions, bientôt je la ressaisis avec une passion renouvelée, je ne puis m’en détacher, il me faut la multiplier dans un spasme d’extase, en toutes les modulations ; et au dernier moment, je triomphe d’elle, je la possède, celle que je poursuivais, la première pensée ! Et voyez, c’est une symphonie !... Oui, la musique est vraiment la médiatrice entre la vie des sens et la vie de l’esprit. (Ja, Musik ist so recht die Vermittelung des geistigen Lebens zum Sinnlichen. (Je voudrais en parler avec Gœthe. Est-ce qu’il me comprendrait ?... »

Il insiste : i.i. La phrase allemande est si riche d’énergies accumulées qu’on est obligé de l’étendre dans la traduction, pour n’en rien perdre. « Ausladen... von... nach... hin... » indique une décharge torrentielle, mais vers un but. A la fois, volonté et force de la nature.