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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/35

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GŒTHE ET BEETHOVEN

« La mélodie est la oie sensuelle de la poésie (Mélodie ist das sinnliche Leben der Poésie). N’est-ce pas par la mélodie que le contenu spirituel d’une poésie s’infiltre dans nos sens ? La mélodie de Mignon ne communique-t-elle pas Ventière Stimmung sensuelle clu lied1 ? Et cette impression ressentie n’excite-t-elle pas l’esprit à de nouveaux enfantements ?... »

Ici, Bettine prête à Beethoven l’intuition d’un subconscient musical, plus profond et plus vaste mille fois que la pensée exprimée par les mots,

— devançant ainsi Schopenhauer et Wagner. — Et, revenant à Gœthe, il redouble son appel : « Parlez de moi à Gœthe ! Dites-lui qu’il doit entendre mes symphonies ! Il m’accordera que la musique est l’unique, l’immatérielle entrée dans un monde plus haut du savoir, dont l’homme est enveloppé sans qu’il puisse le saisir... Ce que l’esprit reçoit d’elle par les sens, c’est une révélation spirituelle incarnée... Ecrivez de moi à Gœthe, si vous me comprenez !... Je veux aussi, de tout cœur, qu’il m instruise !... »

1. A noter que Bettine, qui rapporte ces paroles, est personnellement d’un avis différent, puisqu’elle dit que la musique n’ajoute rien aux lieder de Gœthe. Sa relation offre donc, de ce fait, plus de garanties d’authenticité.