Aller au contenu

Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
27
GŒTHE ET BEETHOVEN

ginaire. Et l’énigme de Betiine n’en demeure plus une, que pour ceux qui n’ont point l’habitude des âmes féminines et le don de sympathie, sans lequel les portes ne s’ouvriront jamais à l’intelligence.

Non, elle n’avait rien d’une « Sibylle du Nord », comme l’ont appelée tels de ses modernes historiens, la petite Brentano de 1807 à 1810 ! — (Car lorsqu’on décrit une âme, il faut bien distinguer, d’abord, l’heure où on la saisit : nul ne reste le même, au cours de toute une vie ; et, moins qu’une autre, une femme toute livrée à son cœur tendre et fou, comme Bettine. Plus tard, les traits se modifient, l’âge les plisse, et fait du sourire juvénile une grimace. Et les yeux de Gœthe ne l’ont point vue avec la même faveur en 1825 qu’en 1807. Mais c’est ici de la petite Mignon de vingt à vingt-cinq ans, que nous avons à parler.) 1

1. Commençons par fixer exactement l’âge et l’état moral des trois héros de notre récit, à cette date de 1810. Gœthe a soixante et un ans. Il a enfin épousé, en octobre 1806, Christiane, avec qui il vit depuis dix-huit ans, et qu’il a bien de la peine encore à faire accepter de la société de Weimar. Son fila August a dix-sept ans. — C’est dans quatre ans (septembre 1814) qu’il rencontrera Marianne von Willemer, et que fleurira pour lui, avec le Wcsl-ôstlicher Divan, un nouveau printemps du cœur.

  • — Pour le moment, il paraît un peu engoncé dans sa méfiance

du nouvel esprit, des jeunes générations, dans l’ordre officiel et la respectabilité. Nous ne le verrons que trop, dans les pages qui Suivent.

Beethoven a quarante ans. Il est en pleine vigueur et flambe