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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/40

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GŒTHE ET BEETHOVEN

à peine, il n’est en elle rien de faux ou de frelaté : une générosité sans bornes, d’esprit et de cœur, une merveilleuse spontanéité.

1810 : c’est T année où Gœthe, longtemps réservé, est le plus épris d’elle : car il n’a pu, lui non plus, résister à son charme l. Et c’est l’année où elle, dont la vie entière fut scellée de l’amour de Gœthe, unique, halluciné, et de l’anneau mystique, qu’à sa première rencontre, il eut l’imprudence de lui passer au doigt, — se sentait le plus proche de lui et l’aima complètement. Ses lettres de janvier et février 1810 la montrent absorbée en lui, comme une Thérèse d’Avila en ses visions amoureuses. — Et il ne faudrait pas croire que Gœthe se sentît fatigué de cette adoration excessive ! Il la buvait, ainsi qu’un chat le lait sucré. Non seulement il en remercie Bettine (février 1810) ; mais, n’en ayant pas reçu l’expression renouvelée pendant un mois, il s’inquiète et il la sollicite (10 mai 1810) ; il ne se sépare pas des lettres de Bettine, et les emporte en voyage.

Or, c’est dans ces conditions que Bettine voit Beethoven, pour la première fois. Quelle raison 1. Le 13 décembre 1809, Wilhelm Grimm étant à déjeuner chez Gœthe, celui-ci lui dit qu’il a reçu le portrait de Bettine par Louis Grimm (un ravissant dessin, que nous reproduisons) ; il le loue beaucoup ; il en témoigne une grande joie. Wilhelm Grimm observe que Bettine ne trouvait pas le portrait ressemblant. Alors Gœthe : « Oui, c’est une chère enfant 1 Qui pourrait bien la peindre P Si Lucas Kranach vivait encore, celui-là était fait pour elle !... »