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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/58

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GŒTHE ET BEETHOVEN

a conçue, en l’associant à ses propres travaux1. Beethoven eût donc été très près, à cette heure, de forcer les portes de la sympathie intellectuelle de Gœthe, s’il ne s’était trouvé un tiers, présent aux entretiens, qui annihila les efforts de Bettine : — Zelter.

On sait quelle solide amitié unissait Gœthe à ce brave gâche-mortier de la musique, cet honnête homme, ce bon musicien, ce parfait Philistin, fidèle Àchate de son Enée. Aucun ciment n’eut la durée de cet attachement, qui a sa beauté. Mais une loi déplorable du génie semble exiger, pour ses besoins d’amitié, une forte dose de médiocrité. Avec ceux de son rang, il ne peut être ami qu’en passant. L’entourage intime de Gœthe, à peu d’exceptions près, fut, depuis la mort de Schiller, d’une étonnante pauvreté : des bourgeois de province, de vingt ans en arrière, épais, étroits et étriqués. Ses jeunes visiteurs en furent, plus d’une fois, scandalisés. Dans son équipe de manœuvres, à toute épreuve du dévouement, Zelter était, resta jusqu’à la fin le contre-maître, l’unique oracle pour la musique. A sa sincère, à son obtuse incompréhension, Gœthe s’en remettait passivement de ce qu’il devait admirer ou rejeter. Que lui disait de Beethoven son Zelter1 2 3 ? 1. A son autobiographie.

2. Zelter avait rencontré Beethoven, à Berlin, en 1796. Beethoven, alors âgé de vingt-six ans, y avait donné plusieurs concer !?,