Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/308

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la ligue nouvelle fondée en septembre, cultive ces honteuses maladies de la haine mutuelle et du soupçon. Chacun s’arme contre son voisin. On épie son ombre.

Pendant tout l’été, Annette tâtonne, sans avancer. Tout lui manque. Elle ne peut retourner auprès de Franz, sans attirer l’attention. Et la correspondance est lue. Comment convenir avec lui d’un plan ? Et quel plan ? Il ne saurait être question pour lui de traverser la France à pied : dès le lendemain, il serait arrêté. Il faut aller vite et procéder par surprise. Franz devra rejoindre, au passage, dans un train de grandes lignes, Annette qui l’accompagnera jusqu’à la frontière. Mais les trains pour la Suisse sont filtrés, au départ et à l’arrivée. Et qui conduira Franz, de la ville où il est interné, au train libérateur ? Et qui sera son guide, à travers la frontière ?… C’est trop peu d’un seul, pour exécuter un tel projet. Et Annette n’a personne à qui se confier…

Le hasard vient à son aide. — Elle est rentrée à Paris, pendant les mois de vacances. Elle est dans son appartement, et elle tient dans ses mains une porcelaine de Chine, qui a été brisée, un des rares souvenirs qui lui soient restés de l’élégant décor de la maison du passé : Boulogne, où les deux sœurs